mardi 23 septembre 2008

La sixième extinction des espèces peut encore être évitée

Article paru dans Le Monde daté du 14 août 2008 et écrit par Christiane Galus.
J'ai inséré dans cette article quelques remarques et réflexions, qui figurent en bleu
L'espèce humaine, forte de 6,7 milliards d'individus, a tellement modifié son environnement qu'elle porte maintenant gravement atteinte à la biodiversité des espèces terrestres et marines, et à terme à sa propre survie. A tel point que des scientifiques, de plus en plus nombreux, n'hésitent pas à parler d'une sixième extinction, succédant aux cinq précédentes - dues à d'importantes modifications naturelles de l'environnement - qui ont scandé la vie sur Terre.
L'Union mondiale pour la nature (UICN), qui travaille sur 41 415 espèces (sur environ 1,75 million connues) pour établir sa liste rouge annuelle, estime que 16 306 sont menacées. Un mammifère sur quatre, un oiseau sur huit, un tiers de tous les amphibiens et 70 % de toutes les plantes évaluées sont en péril, constate l'UICN.
Les débuts de la vie remontent à 3,7 milliards d'années. Mais il a fallu attendre l'explosion du cambrien, il y a 500 millions d'années (Ma), pour qu'apparaissent les premiers organismes marins complexes. A partir de cette date, cinq grandes extinctions ont eu lieu.
LA PREMIÈRE, IL Y A 440 MA, a fait disparaître 65 % des espèces, toutes marines. Des glaciations importantes suivies d'un réchauffement auraient provoqué de grandes fluctuations des niveaux marins.
LA DEUXIÈME, IL Y A 380 MA, a causé la mort de 72 % des espèces, marines pour l'essentiel. La catastrophe serait due à un refroidissement global succédant à la chute de plusieurs météorites.
LA TROISIÈME, IL Y A 250 MA, a été si importante que la vie a failli ne pas s'en relever. On estime que 90 % de toutes les espèces (marines et terrestres) ont disparu. Les causes de la catastrophe sont encore en débat, mais on pense que d'immenses coulées de lave en Sibérie, peut-être provoquées par la chute d'un astéroïde, ont profondément changé le climat et diminué l'oxygène dissous dans l'eau des mers.
LA QUATRIÈME, IL Y A 200 MA, est associée à l'ouverture de l'océan Atlantique et à d'importantes coulées de lave qui ont réchauffé le climat. 65 % des espèces ont péri.
LA CINQUIÈME, IL Y A 65 MA, est la plus connue, car elle est associée à la disparition des dinosaures et de 62 % des espèces. Les causes avancées sont la chute d'un astéroïde dans le golfe du Mexique et d'importantes coulées de lave en Inde.
PLUS PRÈS DE NOUS, AU COURS D'UNE PÉRIODE ALLANT DE 50 000 À 3 000 ANS, avant aujourd'hui, la moitié des espèces des grands mammifères pesant plus de 44 kg ont disparu. Certains chercheurs incriminent principalement l'homme et estiment que la sixième extinction, celle qui est due à l'action d'Homo sapiens a déjà commencé.
Est-il encore possible de freiner ce déclin des espèces, qui risque de s'amplifier quand notre planète portera 9,3 milliards d'humains en 2050 ?
Les biologistes américains Paul Ehrlich et Robert Pringle (université Stanford, Californie) pensent que oui, à condition de prendre plusieurs mesures radicales sur le plan mondial. Ils les présentent dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences américaine (PNAS) du 12 août, qui consacrent un dossier spécial à la sixième extinction. En préambule, ces deux chercheurs n'hésitent pas à déclarer que "l'avenir de la biodiversité pour les dix prochains millions d'années sera certainement déterminé dans les cinquante à cent ans à venir par l'activité d'une seule espèce, Homo sapiens, vieille de seulement 200 000 ans". AA: On dit souvent que cette extinction est inéluctable, parce que, contrairement aux changements climatiques qui nécessitent une volonté politique (action concertée et structurelle: investissements massifs pour réduire les consommations et développement des énergies alternatives et durables), nous ne pouvons plus, ni faire marche arrière, ni surtout "réparer" et empêcher cette évolution. De plus, et c'est ce que préconisent les 2 chercheurs, c'est surtout une évolution des comportements, et cela, c'est beaucoup plus difficile à mobiliser que de l'argent!
Si l'on considère que les espèces de mammifères - dont nous faisons partie - durent en moyenne un million d'années, cela place Homo sapiens au milieu de l'adolescence. Or cet "ado" mal dégrossi, "narcissique et présupposant sa propre immortalité, a maltraité l'écosystème qui l'a créé et le maintient en vie, sans souci des conséquences", ajoutent sévèrement Paul Ehrlich et Robert Pringle.
SURCONSOMMATION
Il faut donc, selon eux, insuffler un changement profond dans les mentalités, de façon à porter un autre regard sur la nature. AA: C'est ce que l'on appelle, aujourd'hui, improprement "la décroissance": il 'agit plutôt de croître autrement. Il faut rompre avec le dogme du PIB: quand on sait que celui-ci augmente après une guerre ou une catastrophe, parce qu'il mesure seulement l'activité économique. D'autres critères existent aujourd'hui, pour mesurer les progrès, et prennent en compte, par exemple la santé, l'espérance de vie, la participation des femmes à la vie politique ou encore le taux de pauvreté...
Car, disent-ils, "l'idée que la croissance économique est indépendante de la santé de l'environnement et que l'humanité peut étendre indéfiniment son économie est une dangereuse illusion". Pour contrer cette dérive, il faut commencer par maîtriser l'expansion démographique et diminuer notre surconsommation des ressources naturelles, dont une bonne part sert à assouvir des goûts superflus et non des besoins fondamentaux AA: il s'agit là d'un point fondamental, puisque cela implique une révision complète de nos politiques dites économiques: mise en cause d'une évolution basée sur le toujours plus: plus de biens, plus de profits, plus de publicité, plus d'inégalités, donc plus de délinquance et d'insécurité, etc, etc. On voit bien que nous sommes loin de ce monde dans lequel régneraient la solidarité, l'amour, la culture, en un mot: le bonheur! Beaucoup ont essayé: les religions, le marxisme...et malgré leurs échecs, faut-il désespérer et abandonner? N'oublions pas que nous sommes les maillons d'une longue chaîne et qu'il nous faut assumer nos responsabilités d'hommes libres...
La pisciculture et l'aviculture sont par exemple moins coûteuses en transport et en fioul que l'élevage des porcs et des boeufs, réunis dans le sacro-saint cheeseburger au bacon... AA: c'est discutable, car justement contraire à la promotion de la biodiversité...Autre angle d'attaque : les services offerts par la biosphère sont nombreux et gratuits. Elle fournit les matières premières, les systèmes naturels de filtration des eaux, le stockage du carbone par les forêts, la prévention de l'érosion et des inondations par la végétation, et la pollinisation des plantes par des insectes et des oiseaux. A elle seule, cette dernière activité pèse 1,5 milliard de dollars aux Etats-Unis. Aussi serait-il souhaitable d'évaluer le coût des services offerts par la nature et de l'intégrer dans les calculs économiques pour assurer leur protection. AA: c'est une idée qui fait son chemin ( la taxe carbone); les meilleurs exemples en sont l'eau et l'air, dont personne jusqu'à présent n'a été comptable de leur détérioration.
Pour financer le développement des zones protégées, pas assez nombreuses et trop morcelées, Paul Ehrlich et Robert Pringle proposent de faire appel à des fondations privées dédiées à la conservation. Ce qui coûte moins cher au contribuable et permet de générer des sommes importantes. Au Costa Rica, un fonds de ce genre, Paz con la naturaleza, a drainé 500 millions de dollars, somme qui servira à financer le système de conservation du pays. On peut aussi associer plus étroitement pasteurs et agriculteurs à la préservation de la biodiversité, en évitant de leur imposer des décisions sur lesquelles ils n'ont pas prise, et à condition qu'ils y trouvent leur compte.
Cela passe par des explications et une meilleure éducation dans ce domaine. Mais rien n'empêche aussi de restaurer les habitats dégradés.Cependant, les deux chercheurs s'inquiètent du divorce croissant, dans les pays industrialisés, entre la population et la nature, divorce dû à l'utilisation intensive du multimédia. Ils remarquent que, "aux Etats-Unis, la montée des médias électroniques a coïncidé avec une baisse importante des visites des parcs nationaux, après cinquante ans de croissance ininterrompue". AA D'où déclinés au niveau européen, régionaux et locaux, les schémas de restauration et préservation de la biodiversité, tes que les trames vertes et bleus. Et il semble que des phénomènes similaires aient lieu dans d'autres pays développés. Aussi, avec un sens certain de l'à-propos, Paul Ehrlich et Robert Pringle proposent-ils d'ajouter une dimension écologique aux univers virtuels les plus connus, tel Second Life.

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