Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) Envoyé spécial
Depuis que "M. le maire" a été écroué, le 9 avril, les élus de la majorité municipale ont d'un commun accord décidé qu'aucun d'entre eux ne franchirait le seuil de son bureau. Comme si l'endroit, au rez-de-chaussée de l'imposant hôtel de ville, évoquait la fameuse pièce secrète de Barbe-Bleue.
C'est d'ici que, pendant huit ans, Gérard Dalongeville (PS), mis en examen pour détournement de fonds publics, a dirigé Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), aujourd'hui au bord de la faillite. Dissimulé derrière une boiserie, on y a trouvé un coffre contenant 13 000 euros en liquide dont le maire a assuré aux enquêteurs ne pas connaître l'existence. "On découvre l'envers du décor. Ça peut paraître naïf, mais aucun élu ne s'y attendait", assure Jean-Bernard Deshayes, devenu premier adjoint la veille de l'interpellation du maire.
"Avec la présence de Marine Le Pen et de sa troupe, les conseils municipaux étaient déjà invivables ; cela ne va pas s'arranger", soupire-t-il. A la tête de l'opposition municipale (28 % des voix en mars 2008), la vice-présidente du Front national dénonce "un système mafieux". Le lendemain de l'incarcération de M. Dalongeville, Marine Le Pen a organisé sur le marché d'Hénin-Beaumont "une collecte d'oranges au profit du maire".
Gérard Dalongeville, aujourd'hui âgé de 38 ans, était à peine trentenaire lorsqu'en 2001, il s'est imposé à la tête d'une liste de gauche dissidente face au maire socialiste sortant dont il avait été le directeur de cabinet. Surnommé "Brutus" et exclu du PS, il rejoint les rangs chevénementistes avant d'être réintégré dans le giron socialiste, après sa réélection en 2008.
Ceux qui l'ont croisé évoquent la double personnalité d'un homme "qui s'est laissé pousser la barbe pour se vieillir". Secret, voire hermétique, Gérard Dalongeville sait aussi afficher une faconde très ch'ti et un redoutable sens du contact. "Il avait le souci de rendre service à tout le monde", souligne M. Deshayes. Multipliant les contrats d'embauche à durée déterminée, Gérard Dalongeville a organisé une forme de traitement municipal du chômage teinté de clientélisme.
"FUITE EN AVANT"
Cette commune de 27 000 habitants dont les charges salariales pèsent 60 % du budget de fonctionnement comptera jusqu'à 765 employés. Parmi les bénéficiaires, beaucoup de licenciés de l'usine Samsonite ou de Metal-Europe. Me Didier Cattoir, son avocat, parle de "négligences" dans la gestion d'une municipalité où "les relations de confiance" prenaient le pas sur les stricts critères de gestion mais aussi "de fortes sollicitations" liées au contexte social d'une agglomération où le taux de chômage frise les 17 %. "Moi et toute ma famille, nous ne comprenons pas ce qui se passe. Le maire est pourtant quelqu'un de bien !" s'étonne une jeune fille croisée aux abords de l'hôtel de ville.
Les premiers éléments de l'enquête vont bien au-delà de la dérive massive des finances de la ville que la cour régionale des comptes avait déjà pointé à plusieurs reprises. La procureure de la République de Béthune fait état d'un système de fausses factures dont l'ampleur est évaluée à 900 000 euros, mais qui pourrait atteindre 4 millions d'euros. Des prestations (vidéo-surveillance, gardiennage, entretien des bâtiments et espaces publics) auraient été facturées sans réelle contrepartie.
Les enquêteurs, qui n'excluent pas un enrichissement personnel, s'intéressent aussi à des voyages en avion-taxi payés à un certain Guy Mollet, homme d'affaires controversé et organisateur de courses cyclistes, lui aussi mis en examen et incarcéré. Tout comme Claude Chopin, ancien adjoint aux finances et figure locale du PS. "Dalongeville s'est lancé dans une fuite en avant et jusqu'au dernier moment, il a cru qu'il pourrait être sauvé par le gong", estime Marie-Noëlle Lienemann, ancienne secrétaire d'Etat socialiste au logement et privée début avril de son poste de première adjointe par le maire pour avoir refusé de voter le dernier budget.
De son côté, Marine Le Pen reconnaît "ne pas bouder son plaisir". Elle se dit curieuse de connaître l'issue des "investigations menées auprès de certaines entreprises qui travaillent aussi avec d'autres mairies socialistes". Et attend, "confiante", le jugement en appel de sa plainte visant à annuler les élections de mars 2008 "totalement faussées par 264 embauches de personnel municipal réalisées pendant la période électorale".
Pierre Ferrari, l'un des seuls élus PS qui se soit opposé à Gérard Dalongeville, pense qu'un nouveau scrutin serait le seul moyen de "redonner du crédit à la politique aux yeux des habitants". "Je ne crois pas à la victoire de l'extrême droite, assure-t-il. Ici, les gens veulent que les choses rentrent dans l'ordre et que Hénin-Beaumont ne soit plus montrée du doigt."
Encore une fois merci Monsieur Alain ALPERN pour cette présentation " nationale" de la saga locale. L'anecdote de la barbe n'est pas banale. On rentre à pas feutrés dans le psy . Nous avons hâte de connaître, un jour, le résultat d'une enquête de personnalité sur le personnage atypique qu'est assurément le maire d'Hénin Beaumont.
RépondreSupprimerSera-ce à la barre d'un tribunal ?
Dites nous tout.
On parle souvent du grand nombre d'ex salariés Samsonite ou Métaleurop embauchés à la Mairie. A t-on vérifié et calibré cette affirmation sans cesse diffusée par les médias, ici par Le Monde ?
RépondreSupprimerA Anonyme de 7H43
RépondreSupprimerC'est vrai que la psychologie de GD mériterait d'être étudiée: on parle de ses relations avec son père, avec Delevoye et Darchicourt. Certains évoquent le fait qu'il est à mille lieux des réalités quotidiennes.
J'ai été frappé, il y a peu de temps, par son attitude envers moi. Je venais de m'adresser, publiquement, à lui pour qu'il démissionne (article: "Gérard, il faut que tu démissionnes!"). Quelle ne fut pas ma surprise, lors d'une réception, de l'entendre me saluer chaleureusement et de s'adresser à moi, à plusieurs reprises, par des "mon cher Alain" qui ont jeté le trouble dans l'assistance. Je me demande si, sur le moment, il n'était pas sincère...
A Anonyme de 8H11: je pense que les élus municipaux peuvent avoir accès à ces renseignements...Pierre Ferrari qui eût un temps la délégation économique doit pouvoir également nous renseigner et s'il lit ces lignes, je ne doute pas qu'il nous fera part de son sentiment sur le sujet, n'est-ce pas Pierre?
Proche des Associations Choeurs de Fondeurs et Aced (futur Centre de Vie de la Métallurgie) je confirme aucun ex Métallo embauché à la Mairie.(Seul un leader charismatique fut approché à une certaine époque où il était très médiatique mais il a décliné l'offre).On dénote cependant une dizaine d'ex salariés de Samsonite embauchés pendant une certaine période électorale......
RépondreSupprimerVous semblez décrire des symptômes relevant de la schizophrénie dans votre commentaire de 8h35.
RépondreSupprimerPour changer de sujet.
Ce matin, au journal de 9h00, sur France Inter, un reportage était consacré à Marine Lepen.Une analyse pointue qui révélait les véritables enjeux internes au FN (bataille des élections européennes avec la dissidence de Lang, succession de Jean-Marie Lepen)avec en ligne de mire, les futures élections municipales à Hénin-Beaumont.
Jean-Eric
A lire le commentaire de 9 h 24, je suis amené à revoir mon point de vue sur l'objectivité des articles "Du Monde". J'ai toujours entendu dire que ce journal vérifié et re vérifié ses informations avant de publier. Alors lorsqu'on écrit "... parmi les bénéficiaires, beaucoup de licenciés de l'usine Samsonite et Metal Europe ..." , (a priori et respectivement une dizaine sur 210 (5 %) et 0 sur 830 (0 %)) on peut s'interroger sur ce que l'on qualifie de "BEAUCOUP" .
RépondreSupprimerPlus généralement, cette information a été relayée sans regard critique par plusieurs médias ... pourtant ces deux reclassements avaient en leur temps été suivis et médiatisés.
Bon je retourne à mon dictionnaire pour vérifier la définition du mot "beaucoup". Soudain, je doute ...
Je sais que Monsieur Noël aime éclairer les citations que j’ai reprises sur son blog ;
RépondreSupprimerMalheureusement, c’est très incomplet, car je n’ai pu consulter ses compte-rendus des CM des 12/2/09 et 27/02/09.
Quelqu’un les aurait-il conserver ?
Pourquoi M.Noël parle-t-il toujours des communistes, alors qu’il est seul à siéger, sa colistière ne venant plus depuis longtemps ?
Florilège :
Responsables, les communistes entendent bien travailler et se battre, aux côtés de leurs collègues de la majorité pour rétablir la situation.
Une fois de plus, je constate que même les communiqués les plus fermes ne conviennent pas aux gens de l'opposition. Vous êtes dans la schizophrénie la plus totale : on nous reproche contre toute évidence de ne pas chercher à infléchir la politique municipale alors que c'est ce que nous faisons en permanence et quoi qu'on fasse, on nous répète d'une manière incantatoire qu'il faut démissionner. Si nous le faisions, je ne vois pas ce que nous pourrions infléchir !
D'abord, parce que je ne regrette rien. Je me suis battu pour qu'il y ait union de la gauche face au Front National. Nous avons battu Marine Le Pen, et sans perdre notre âme dans des alliances confusionnistes avec le Modem et l'UMP. Nous avons battu Marine Le Pen sur une ligne claire, une ligne d'union de la gauche. Si c'était à refaire, je le referai.
« Niveau mauvaise foi, monsieur Noel, vous étes le champion »
J'ai expliqué ma position. Elle est très claire.
- La responsabilité des dettes est partagée.
- Gérard Dalongeville est partiellement responsable de la situation difficile des finances de la commune, mais il n'est pas le seul.
- Le PCF ne porte aucune responsabilité.
- Les communistes se sont alliés avec le PS pour battre le Front National, ils restent dans la majorité pour rétablir la situation, ils s'exprimeront pour faire connaître leur position. Personne n'a encore été en mesure de me démontrer que Gérard Dalongeville était le seul et unique responsable de la situation des finances de la ville et pour cause, il ne l'est pas ! Personne n'a réussi à me démontrer que le Parti Communiste devait adopter une stratégie d'alliances au centre ou d'alliances à droite (sic) face au Front National.
Personne n'a réussi à me démontrer que mon départ de la majorité municipale changerait la donne. Et pour cause ! Si le pôle critique de la majorité la quitte, eh bien, il n'y aura plus de pôle critique dans la majorité, tout simplement !
Tous pourris : Gérard Dalongeville, Marie-Noëlle Lienemann, Pierre Ferrari, la direction fédérale du PS, la direction fédérale du PCF et moi, nous sommes tous les acteurs d'un vaste complot destiné à ruiner Hénin-Beaumont !
Il est naturel que nous ayons des différences, mais je respecte le Maire d'Hénin-Beaumont et il me fait confiance.
Jean-Pierre Chruszez et Marie-Noëlle Lienemann ont également ferraillé contre l'opposition en rejetant l'accusation brandie par l'opposition d'une future augmentation des impôts. Pour la première adjointe et le président du groupe majoritaire, le plan de redressement présenté dans le cadre du DOB doit permettre de trouver les 4 millions d'euros d'économies annuelles et d'éviter une nouvelle augmentation de la pression fiscale, insupportable pour nos concitoyens et qui ferait d'Hénin-Beaumont la ville la plus lourdement taxée de sa catégorie au plan national (2 février)
Dans l'état actuel des choses, rien ne dit que des élus seraient partie prenante du système organisé décrit par la Brigade Financière et dévoilé dans les colonnes de Nord Eclair et nous respectons la présomption d'innocence.(toujours le 2/2/09)
A Jean-Eric:
RépondreSupprimervoyez : http://jt.france3.fr/1213/
reportage à 9mn 45
Pour ceux qui croiraient encore le gentil FN...
A Anonyme de 11H02
Votre (trop long)message pêche sur 2 points:
- ce sont des citations tirées d'un contexte qu'il faudrait analyser, mais qu'il nous serait fastidieux de rechercher. Cela nuit à l'objectivité de votre message.
- David Noël est devenu de plus en plus critique sur son blog, à partir de septembre/octobre: il a cru pouvoir réformer de l'intérieur et s'est rapidement aperçu de son erreur . Le reproche que je lui ferais, c'est de ne pas avoir, alors, rejoint l'opposition. Bien sûr, c'est facile à dire a posteriori. Un jour je relirai ce que j'ai écrit, mais il me semble en avoir fait la remarque à l'automne (à lui, mais aussi à P.Ferrari et MNL)
L'heure n'est plus au regret et aux critiques de ceux qui ont essayé mais n'ont pas pu arrêter la folie de GD
Je pense qu'il convient de stopper dorénavant ce jeu des citations...
> L'avenir est quelque chose qui se surmonte. On ne subit pas l'avenir, on le fait.
RépondreSupprimer[Georges Bernanos] [+]
Extrait de La liberté pour quoi faire ? [+]
Le jeu des citations peut s'arrêter à celle-ci qui remet tout le monde au travail, le ragArd rivé sur l'avenir calendaire.
Demain ne sera pas un long fleuve tranquille....Qu'on se le dise, qu'on s'en persuade!
Souhaitons-nous collectivement courage!