samedi 22 août 2009

"Les chiens ne font pas des chats"

L'histoire du père de notre Président de la République nous éclaire sur certains traits de caractère de son fils: arranger les faits, renoncer à sa parole, amour du bling-bling, des femmes...

Vous noterez les difficultés pour papa Sarko de devenir français: le fiston ne se souvient pas des problèmes des immigrés...

Papa Pal, lui aussi, passe son temps entre Neuilly et la dolce vita...

Mais après tout c'est une belle histoire d'intégration réussie.

Pourquoi n'en parle-t-on pas? Le Président étatsunien est fils d'immigrés. Mais le Président français aussi!









Pal Sarkozy, bousculé par l'Histoire
LE MONDE | 17.08.09 | 15h20 • Mis à jour le 17.08.09 | 18h04

'âge et des problèmes de dos l'ont bien raboté de quelques centimètres, mais Pal Sarkozy porte haut ses 81 ans et reste un bel homme, avec l'assurance de qui s'est toujours su pour les femmes un doux péril. Le vieux monsieur cultive une exquise courtoisie qui dénote - il le sait - l'homme du monde, même en short et en chemise à fleurs.

Il prend le soleil à Ibiza, esquisse ses prochains tableaux et regarde passer les filles avec le charme blasé des grandes familles austro-hongroises, qu'un destin tragique a égarées loin de l'amère patrie.

La vie du père du président de la République a été bousculée par l'histoire et s'il a choisi de s'installer en France un peu par hasard, il en a fait une légende magnifique. Ses méandres lui échappent un peu, qu'importe : les fausses confidences sont encore du Marivaux, ce qui n'est pas pour lui déplaire.

Pal Istvan Ernö Särközy Nagybocsaï est né le 5 mai 1928 à Budapest dans une famille de la petite noblesse hongroise, anoblie en 1628 par la grâce d'un aïeul qui a taillé des croupières aux Turcs. Il raconte fort bien ses tendres années sur les immenses terres à blé du château paternel d'Alattyán - "une gentilhommière", corrige modestement le monsieur - près de Szolnok, une petite ville au sud-est de Budapest, dont son père était aussi le vice-maire.

Pal aurait grandi entouré de domestiques, allait à l'école à cheval et a souvent raconté qu'il avait été envoyé, comme tous les jeunes aristocrates fortunés, chez les bons Pères en Suisse, où il apprit le français. L'histoire est un peu moins romanesque.

Pascale Nivelle et Elise Karlin, dans une enquête serrée sur la famille, Les Sarkozy, une famille française (Calmann-Lévy 2006), ont découvert que György, le père de Pal, n'était qu'un clerc de notaire devenu fonctionnaire municipal, puis effectivement vice-maire de Szolnok. Le château d'Alattyán a bien existé, mais il appartenait à un lointain cousin. Les enfants y allaient "le week-end et pendant les vacances", concède Pal aujourd'hui.

En 1938, un scandale éclate à Szolnok. Sarkozy père est jugé pour détournement de fonds, il s'exile à Budapest et y devient gérant d'une entreprise de tricot. "Une usine de casseroles", croit sans rire son fils, qui a gommé ces épisodes un peu pénibles. "J'avais 10 ans, j'étais interne, on ne parlait pas de ça à la maison."

Le petit est chez les Pères prémontrés à Gödölö, puis chez les jésuites. Pal Sarkozy ne parle pas beaucoup de la guerre. Un de ses frères est pourtant hussard dans ces années troubles et la famille semble avoir eu de la sympathie pour l'amiral Horthy, le régent nationaliste entré en guerre aux côtés de l'Allemagne nazie en 1941.

Pal explique avec aplomb que l'amiral a fini par être déporté à Auschwitz : il a en fait tranquillement fini ses jours au Portugal. Ce n'est pas le régime ultranationaliste ni l'occupation allemande que fuient bientôt les Sarkozy. C'est l'Armée rouge.

Ils s'installent en 1944 dans le sud de l'Autriche, mais György se morfond et décide de rentrer au pays. "Il ne comprenait rien à la politique", explique Pal. Toute la famille passe de l'autre côté du rideau de fer ; le château d'Alattyán a été transformé en lotissements, et à Szolnok, György meurt un soir de 1948, à 51 ans. Pal envisage avec terreur de faire son service militaire chez les Russes. Il décide de repasser à l'Ouest, sa mère lui donne sa bénédiction, la chevalière paternelle et rendez-vous à Paris, dans un hôtel de l'avenue Pierre Ier-de-Serbie.

Pal passe sans difficulté en Autriche, file en Allemagne au consulat français de Baden-Baden, qui lui refuse un visa, et échoue à Innsbruck, en Autriche. C'est là qu'il rencontre un recruteur de la Légion étrangère qui lui paie des coups et lui en promet d'autres : le jeune homme signe un engagement pour l'Indochine. "Parfois les mauvais choix sont les bons, philosophe Pal. S'engager pour l'Indochine à 20 ans, c'est le plus mauvais qu'on puisse faire, finalement je suis arrivé à Paris et l'un de mes fils est président de la République..."

On l'envoie de Strasbourg à Marseille, il tombe heureusement lors de la visite médicale sur un compatriote hongrois qui demande au gamin : "Qu'est-ce que tu fous là ?" Pal lui raconte son histoire ; le lendemain il est déclaré inapte et on le jette dans un wagon à bestiaux pour Paris avec 1 kg de haricots et une baguette de pain.

A Paris, en décembre 1948, il fait un froid de gueux, Pal a faim, du journal autour des pieds faute de chaussures. Le jeune homme passe sa première nuit recroquevillé sur une bouche de métro, place de l'Etoile. Il file le lendemain au centre des réfugiés qui lui délivre un passeport d'apatride, puis chez un grand-oncle maternel qui habite rue Ordener, dans le 18e arrondissement.

Le grand-oncle lui ouvre les bras, c'est la fin des vaches maigres. Le jeune homme décroche vite un boulot, enchaîne chez un architecte, son charme fait merveille et il a un bon coup de crayon. Il fait de petits portraits de la bonne société des exilés de l'Est et finit par tomber amoureux d'Andrée Mallah, la jolie fille d'un médecin bourgeoisement installé dans le 17e.

Pal, en frac, épouse Andrée avec faste en février 1950, et s'installe chez beau-papa, au 2e étage d'un hôtel particulier. Le médecin accepte d'entretenir son gendre le temps qu'il apprenne un métier. L'apatride n'est plus en danger : il n'aura fallu qu'un an au jeune va-nu-pieds pour faire son trou.

Le couple a bientôt trois enfants, Guillaume (1951), Nicolas (1955) puis François (1957), tous nés d'un père apatride malgré les efforts du beau-père qui veut un gendre naturalisé français, ce qu'il ne fera que vingt ans plus tard. "Avec quatre femmes françaises et cinq enfants français, je commençais à me sentir français", précise Pal.

Les époux se séparent : Pal épouse une jeune femme d'origine hongroise, puis une autre avec qui il a deux autres enfants, puis finalement Inès, avec qui il vit depuis trente-neuf ans. "Mon mari a toujours été un séducteur, explique calmement son épouse. Il cherchait des femmes de bonne famille, mais pas riches. Riches, il en perdrait le contrôle."

Financièrement, Pal a réussi. Son studio de publicité a employé jusqu'à 40 personnes et lui assure une retraite confortable, entre Ibiza et l'île de la Jatte, à Neuilly. A 78 ans, il s'est jeté dans la peinture et expose à Madrid, Tunis, à la Fiac. Les toiles, un mélange de peinture et de photos travaillées sur ordinateur par son complice Werner Hornung, se vendent plutôt bien.

Pal juge qu'il a eu une belle vie et est assez satisfait de s'être installé en France, quand sa mère a choisi Munich. Il allume une cigarette - il a commencé à 15 ans, "parce qu'embrasser une fille qui fume si vous ne fumez pas, c'est terrible" - et grille un petit paquet par jour. Quand il se met à tousser, il change de marque. "J'ai un grand avantage sur vous, sourit l'élégant monsieur. Je ne peux pas mourir jeune."


Parcours

1928 - Naissance à Budapest (Hongrie).

Décembre 1948 - Arrive à Paris.

1950 - Mariage avec Andrée Mallah, avec qui il aura trois enfants.

1955 - Naissance de Nicolas Sarkozy.

2009 - Expose à la Foire internationale d'art contemporain (FIAC).


Article paru dans l'édition du 18.08.09

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