jeudi 10 juin 2010

Les "missions" des anciens ministres sont souvent bénévoles




LEMONDE.FR | 10.06.10  20h47

ourquoi l'Elysée a-t-il confié une mission à Christine Boutin ? Au-delà de la polémique sur la compétence de l'ancienne ministre du logement à traiter de l'impact social de la mondialisation, cette pratique n'a rien d'exceptionnel. Il est d'usage en France de confier périodiquement à des personnalités compétentes dans un domaine la charge d'une réflexion sur un sujet donné. Depuis 2007, on en compte plusieurs dizaines.

Nicolas Sarkozy se montre friand de cette pratique qui permet également quelques "coups" politiques. Plusieurs personnalités de gauche ont ainsi effectué des missions pour l'Elysée : Hubert Védrine fut missionné, dès juillet 2007, pour étudier le "positionnement de la France et de l'Europe dans le monde". On se souvient également du rapport rédigé par Jacques Attali sur les pistes pour "libérer la croissance", du travail sur le "grand emprunt" confié à Michel Rocard et Alain Juppé ou des missions d'études de Jack Lang à Cuba ou en Corée du Nord. Ces missions sont-elles rémunérées ? Le député (apparenté PS) René Dosière, spécialiste du budget de l'Elysée, explique qu'il y a "deux types de missions. Soit on les confie à des gens qui ont besoin de gagner leur vie, et qui sont alors rémunérés, soit, le plus souvent, on fait appel à des personnalités, des anciens ministres, qui ont déjà des revenus et qui acceptent de travailler bénévolement. En revanche, on les dote en moyens humains et matériels".
ALAIN JUPPÉ A EFFECTUÉ DEUX MISSIONS BÉNÉVOLEMENT
Le Monde.fr a interrogé plusieurs anciens chargés de mission par l'Elysée, Matignon ou des ministères. Tous confirment cette version. Ancien premier ministre, Alain Juppé a ainsi effectué deux missions, l'une sur le grand emprunt et l'autre sur la politique étrangère française. "Toutes les deux ont été faites de manière totalement bénévole", assure son entourage. Ancien ministre chargé d'une mission sur la valorisation du "made in France", Yves Jégo a expliqué, jeudi 10 juin sur Europe 1, qu'il travaillait lui aussi "de manière totalement bénévole".
Patrick Lozès, président du Conseil représentatif des associations noires (CRAN), est également habitué à effectuer des missions pour le gouvernement. "En général, elles ne sont pas rémunérées. Il est arrivé qu'elles le soient, mais c'était à hauteur de 1 000 euros", explique-t-il. Il cite en exemple la dernière en date, un rapport sur la lutte contre le racisme et le communautarisme que lui a confié Brice Hortefeux. "Je n'ai touché aucun salaire, aucune indemnité", explique-t-il. Quant aux moyens humains, Patrick Lozès a effectivement eu "des locaux mis à disposition, voire du personnel de secrétariat" parfois. Mais de manière assez chiche, précise-t-il.
Son cas semblait bel et bien à part. "C'est un niveau exceptionnel de rémunération", avait estimé Patrick Lozès. Même avis pour René Dosière : "9 500 euros par mois c'est un salaire très élevé pour la fonction publique." Quant aux moyens offerts à l'ex-ministre (une voiture avec chauffeur et 22 000 euros de rémunération pour quatre collaborateurs), ils sont "tout à fait exceptionnels" par rapport à l'usage. "Lors de ma dernière mission, en 2009, pour le ministère de l'intérieur, qui impliquait plusieurs permanents de l'association, nous avons reçu pour quatre mois complets de travail 10 000 euros de subvention de l'Etat", avait ainsi indiqué Patrick Lozès.
UNE PRATIQUE OPAQUE
Si la rémunération et les moyens importants confiés à Christine Boutin apparaissent pour le moins inhabituels, ils n'en sont pas illégaux pour autant. C'est d'ailleurs ce qu'a souligné l'ex-ministre à plusieurs reprises, jeudi, lors d'un passage au journal télévisé de France 2 où elle a annoncé qu'elle renonçait à sa rémunération.
Peu de textes encadrent ces pratiques. "Ce n'est pas publié au Journal officiel", explique René Dosière. Valérie Pécresse a proposé que l'on publie une liste de ces missions, assortie des rémunérations de leurs titulaires. "Une bonne idée", selon l'élu socialiste.
Sollicité, l'Elysée n'a pas donné suite à notre demande de précisions sur les rémunérations accordées aux chargés de mission. Pour sa part, Eric Woerth a souscrit à la proposition de Valérie Pécresse, assurant au micro d'Europe 1 qu'il n'y voyait "aucun inconvénient". Sans pour autant préciser de calendrier.

Samuel Laurent

M. de Raincourt cumule indemnité et retraite

Henri de Raincourt, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, a admis jeudi 10 juin toucher, en plus de son indemnité de ministre, "une petite partie" de sa retraite de sénateur. Interrogé sur Public Sénat à propos du montant de sa retraite, l'ancien sénateur a répondu : "Je n'en sais rien parce que je ne suis pas au taquet."
"Je n'ai pas le nombre d'années nécessaire pour percevoir la retraite globale de parlementaire", a expliqué M. de Raincourt, qui a été sénateur de 1986 à 2009, soit vingt-trois ans. Il a admis en toucher "une petite partie, sans doute, oui".
La retraite moyenne d'un sénateur est de 4 442 euros net par mois. Elle est calculée au prorata de la durée des annuités acquises dans la limite d'un plafond élevé progressivement à quarante et une annuités en 2012. Mais, pour pallier la précarité de la fonction, les parlementaires peuvent cotiser double pendant quinze ans. Les sénateurs peuvent, au bout de ces quinze premières années de leur mandat, acquérir "par demi-cotisations deux annuités et demie au cours des cinq années suivantes", selon le site du Sénat (avec AFP)

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