La comparution, lundi 16 mai, de Dominique Strauss-Kahn pour " agression sexuelle, séquestration de personne et tentative de viol " devant un tribunal pénal new-yorkais n'est que le premier acte d'un long processus judiciaire. La décision de la juge Melissa Jackson d'ordonner l'incarcération du patron du Fonds monétaire international (FMI) est un premier revers pour ses avocats, qui vont désormais se livrer à une contre-enquête dont ils pourront faire état lors des prochains rendez-vous devant la justice américaine.
Grand jury Dans la juridiction de l'Etat de New York, où l'affaire est instruite, l'intervention du grand jury est la prochaine étape. Composé de 16 à 23 jurés tirés au sort parmi les électeurs de l'Etat, il est chargé, dans les trois jours, d'examiner les éléments de preuves.
S'il estime celles-ci suffisantes, c'est ce grand jury qui décide de l'inculpation formelle du suspect. Il se réunit en secret et en l'absence d'un juge. Il peut entendre le témoignage de la victime et de l'accusé en présence de l'avocat de la défense si celui-ci le demande, mais sans qu'il ait la possibilité d'intervenir. Ce n'est qu'alors que le grand jury décidera ou non de l'inculpation formelle de DSK. Une fois cette étape franchie, la défense aura immédiatement accès à " la découverte ", comme l'appellent les spécialistes, c'est-à-dire l'ensemble des dossiers de l'accusation.
Le procureur Aux Etats-Unis, la justice repose sur un système accusatoire. Contrairement au système inquisitoire français, dans lequel un juge d'instruction met en examen le prévenu puis décide ou non de le renvoyer devant un tribunal à l'issue d'une enquête à charge et à décharge, la justice outre-Atlantique charge le procureur de rassembler les preuves pour démontrer l'éventuelle culpabilité de l'accusé. Il va écouter les témoins et rassembler les preuves scientifiques. A la défense de prouver l'innocence de son client.
L'avant-procès En cas d'inculpation formelle de M. Strauss-Kahn par le grand jury, l'ancien ministre de l'économie et des finances comparaîtra une première fois devant la Cour suprême de l'Etat de New York pour se faire signifier officiellement son inculpation. Une audience a d'ores et déjà été fixée au 20 mai. Un juge, différent de celui qui s'est prononcé contre la libération provisoire de DSK lors de l'audience préliminaire de lundi, est alors nommé pour suivre l'affaire.
A charge pour lui de constituer le jury qui prononcera ou non la culpabilité de DSK. Ce jury est composé de 12 individus (plus deux suppléants) qui sont, au départ, tirés au sort. Ils font ensuite l'objet d'une sélection a posteriori par les deux parties. Cette étape peut durer plusieurs semaines.
Avant le procès proprement dit, accusation et défense fourbissent également leurs armes et présentent des " motions préliminaires " qui plantent le décor. La défense peut chercher devant le juge à écarter un témoin ou une preuve. L'accusation peut, de son côté, proposer de nouveaux experts ou témoins. Ces audiences peuvent se multiplier avant la sélection formelle du jury.
Le procès Les avocats ont déjà annoncé que DSK plaiderait non-coupable. Cette stratégie, si elle n'est pas modifiée, ouvre la voie à un procès - contrairement à la procédure dite du " plaider-coupable " qui permet un accord entre accusation et défense sur une peine allégée, si l'accusé reconnaît sa culpabilité.
Le calendrier des audiences est fixé par le juge. Selon de nombreux spécialistes américains, la procédure pourrait être relativement rapide, " une indication supplémentaire de la gravité de l'affaire ". Une fois le procès ouvert, procureur et défense s'affronteront devant les 12 jurés et le juge. L'accusé, les témoins et la plaignante seront tour à tour interrogés par les deux parties.
L'enjeu sera aussi de démontrer si l'accusé a déjà été mis en cause pour des faits similaires. Des éléments qui pourraient s'ajouter aux preuves. Après les plaidoiries, le jury délibère à l'unanimité sur la culpabilité ou non de l'accusé, puis le juge détermine la peine.
Selon la législation de l'Etat de New York, Dominique Strauss-Kahn encourt jusqu'à 26 ans de prison pour tentative de viol, et jusqu'à 74 ans, en théorie, en cas de cumul des peines. Comme il plaide non-coupable, l'ancien ministre des finances risque la peine maximale.
Service International
© Le Monde 18/5/2011
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