Hervé Kempf quitte Le Monde et dit avoir été censuré
Rue 89/Le Nouvel Observateur 02/09/2013
« Adieu Le Monde, vive Reporterre ». Dans un long texte
publiée sur le site Reporterre qu’il va désormais animer, le journaliste
Hervé Kempf, spécialiste des questions d’environnement, raconte sa
décision de quitter le quotidien Le Monde dans le cadre d’une rupture
conventionnelle.
Sans pincette, il dit avoir été victime de censure au Monde, au sujet de l’aéroport de Notre Dames des Landes.
« Que je quitte volontairement un titre prestigieux étonnera peut-être. Mais certes moins que la raison qui m’y pousse : la censure mise en œuvre par sa direction, qui m’a empêché de poursuivre dans ce journal enquêtes et reportages sur le dossier de Notre Dame des Landes. »
Il dit avoir d’abord été étonné d’une couverture faible à son goût de ces événements.
« Ces événements étaient quasiment tus par Le Monde. Le journal publiait cependant le 27 octobre, alors que le résistance se renforçait, un article étonnamment titré “Le ciel se dégage pour l’aéroport de Notre Dame des Landes”. J’avais demandé dès le 16 à partir sur place en reportage, la chef de service me dit que ce n’était pas possible pour des raisons budgétaires. »
Après avoir demandé à retourner sur place, le chroniqueur a de nouveau essuyé un refus, jugé trop partisan sur le sujet.
« On me bloquait les reportages, mais aussi les enquêtes sur une affaire où les intérêts économiques paraissaient singulièrement tortueux. En m’interdisant de traiter ce sujet, en refusant de donner écho à ce que je pourrais voir ou trouver dans mes enquêtes, on assumait le fait que Le Monde ne creuserait pas le dossier de Notre Dame des Landes. C’était, de fait, une censure. »
Pour lui, le quotidien a subi des pressions pour ne pas traiter de l’affaire.
Plus largement, Hervé Kempf analyse la place du journalisme « environnemental » dans la société actuelle :
« Dans le secteur économique dévasté qu’est devenue la presse, et largement dominé par les intérêts capitalistes, le journalisme environnemental est relégué, de nouveau, à la position de cinquième roue du charrette, voire de gêneur. Ce qui compte, dans l’atmosphère délétère d’un système qui ne proclame la démocratie que pour mieux renforcer les logiques oligarchiques, c’est la croissance, l’économie, la production. On ne peut plus feindre qu’il y aurait des journalistes “engagés” et d’autres qui seraient neutres. Derrière la bataille pour l’information se joue celle des priorités, et les choix de priorité renvoient à des visions différentes du monde.
Pour cette raison, il a décidé de s’engager pleinement dans le site
Reporterre, le “site de l’écologie” qu’il avait lancé parallèlement. Et
conclue, de manière un peu lyrique :
“Faiblesse de nos moyens face aux millions des oligarques qui contrôlent les médias, je ris. Nous ne sommes rien, ils sont tout. Mais nous avons ce que l’argent ne peut pas acheter : la conviction, l’enthousiasme, la liberté.”
AA : Voir le site de Reporterre et l'article de H. Kempf : http://www.reporterre.net/spip.php?article4586
Un exemple de plus : " tout est pourri jusqu'à la moelle ".
RépondreSupprimerJe ne suis pas étonnée par une telle nouvelle que je trouve fort dommageable pour notre belle démocratie. Muselé les journalistes qui défendent une cause juste me parait hors propos mais il est vrai que l’État est actuellement à gauche et que leurs projets sont bien meilleurs que ceux de droite. Cela peut paraître réducteur voire même caricaturale comme commentaire mais il est vrai que le silence sur Notre Dame des Landes est éloquent. Quand je pense que le Grenelle 2 de l'Environnement ne sert à rien. L'une des grandes lignes étant de limiter l'étalement urbain et ne pas empiéter sur les terrains agricoles... Apparemment les politiques s'en fichent après tout faire un aéroport là ou le besoin, d'après les enquêtes, est loin d'être prouvé leur apparaît comme nécessaire... Le pire c'est que ce projet n'est qu'un exemple parmi tant d'autres. Merci M.Alpern pour le lien du site.
RépondreSupprimerVieil adage: "vaut mieux un grand chez les autres qu'un petit chez soi". A méditer
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