samedi 14 juin 2008

Une double défaite européenne

Deux évènements survenus hier, vendredi, appellent, de ma part, quelques réflexions sur l'avenir de l'Europe.

Au préalable, pour qu'il n'y ait pas d'ambigüité sur ce qui va suivre, je tiens à préciser que, d'une part, je suis un un partisan de l'Europe, une Europe fédéraliste, qui plus est; et, que, d'autre part, je suis un amoureux du football, un "footeux", comme on dit, et supporter du RC Lens (depuis l'âge de 4 ans!).

Nous venons de prendre connaissance du résultat du référendum sur les institutions européennes, en Irlande. Décidés à ne plus faire confiance aux peuples (!), 26 pays européens, sous l'impulsion de notre Président, avaient décidé de faire ratifier le nouveau traité par leur Parlement respectif (et l'on se dirige vers un assentiment général). Le seul à oser consulter directement sa population, l'Irlande, a essuyé un "no" indiscutable. Normalement le processus de ratification devrait s'arrêter et l'avenir de l'Europe bien compromise pour longtemps.

Le même jour, l"équipe de France de football s'est faite rosser par les Hollandais, 4 buts à 1, au cours du Championnat d'Europe de football. Mon commentaire sportif sera: les Français n'ont pas mal joué et ont manqué de réussite; les Hollandais ont magnifiquement joué et ont eu de la réussite. Les tribunes du stade de Berne étaient colorées en orange, et la ville de Berne avait, dit-on, 100 000 Hollandais visiteurs, qui ont fait la fête, sans la moindre violence.

Pourquoi rapprocher ces 2 évènements? Tout simplement parce que le football, comme tous les autres sports, d'ailleurs (et, plus généralement, comme beaucoup d'autres domaines de la vie), montre que les supporters (et les autres?) sont viscéralement attachés à leur pays, que les hymnes nationaux subliment joueurs et supporters. Les Jeux Olympiques de Pékin seront également l'occasion de pousser des cocoricos français et leur équivalent dans les autres pays compétiteurs. Cela est-il euro-compatible alors que l'Europe ne peut véritablement exister que si elle est une entité unique, probablement sous la forme fédérale? Bref, une Europe sans l'esprit de nation. Je sais qu'il est des zélateurs de l'Europe des nations, mais, outre qu'il ne s'agit pas de vrais partisans de l'Europe, cette Europe des nations ne peut pas exister, entachée qu'elle serait des égoïsmes nationaux.

Je m'explique:

L'Europe est en paix depuis plus de 60 ans, et cela n'était plus arrivé depuis des siècles: notre histoire regorge de guerres entre Français, Allemands (Prussiens et autres), Anglais, Espagnols, Hollandais... La constitution d'une Europe, entité qui entretient des liens permanents et régulés entre ses membres, est à l'origine de cette paix. D'ailleurs, a contrario, la dislocation de l'URSS a engendré des conflits permanents ( Abkhasie, Géorgie, Tchéchènie...); par contre, l'avènement des USA a mis fin aux guerres, entre Nordistes et Sudistes, sans parler des conflits incessants entre états de ce qui allait devenir l'Allemagne et l'Italie, bien après que la France ait réussi, également, son unité. Bref, et schématiquement, c'est le rapprochement entre ces populations autrefois souvent ennemies qui fait que les peuples se parlent et résolvent conventionnellement les problèmes qui les opposaient et peuvent se développer, économiquement et culturellement. A remarquer que toutes les entités que j'ai citées ont choisi une forme de décentralisation des pouvoirs plus ou moins poussée, sauf la France qui pratique une centralisation extrême (la France jacobine), alors que les timides tentatives de décentralisation de ces 25 dernières années et l'émergence des Régions montrent bien le besoin des habitants que les décisions soient prises au plus près d'eux.

A noter également (et cela mériterait d'amples développements) que ces regroupements ne peuvent prospérer que s'il existe une vie démocratique.

On peut donc espérer que lorsque l'Asie, l'Amèrique du Sud, l'Afrique... auront franchi ces différents caps (à nous de les aider!), c'est à dire la stabilité, la démocratie et l'union, la paix règnera dans ces différentes parties du monde. Il nous restera alors à imaginer une seule planète, intelligemment régulée (je n'ose dire dirigée!) pour que" la paix règne chez les Hommes"

Mais avant tout cela il nous reste à règler, en Europe (de quelle Europe parle-t-on, d'ailleurs?) le problème de la persistance des nationalismes exacerbés et propres à entraver le chemin d'une Europe intégrée. Le sport, certes, montre qu'il y a encore des obstacles. et beaucoup d'hommes politiques, notamment, s'accrochent encore à ce nationalisme obsolète et archaïque. Et pourtant, on sent bien vers quoi tend le sens de l'Histoire. Bien sûr, l'Europe que nous voyons se construire aujourd'hui, ne fait pas rêver comme en ses premiers temps. Cette construction trop libérale, pas assez sociale, trop éloignée des préoccupations quotidiennes, ne provoque pas l'enthousiasme. Mais c'est à nous de la construire comme nous la souhaitons. Pour nos enfants et pour un monde meilleur.

La fraternité universelle, le "Aimez-vous les uns les autres" ne sont pas pour demain, certes, mais rien ne nous interdit de nous fixer cet objectif.

Alors quelques modestes propositions pour emprunter ce chemin:

- approfondir la décentralisation, en France;

- développer les euro-régions: les liens entre Nordistes et Wallons, voire même Flamands belges, sont plus étroits qu'entre Nordistes et Corses, par exemple;

- en Europe, introduire une 2ème langue obligatoire neutre culturellement et politiquement: l'espéranto (plutôt que l'anglais, dénaturé, d'ailleurs: le pidgin n'a plus rien à voir avec l'anglais);


- dépasser l'ONU pourrait être un objectif à long terme: mais entre l'ONU d'aujourd'hui et le G8, il y a certainement des lieux dans lesquels les peuples pourraient, dans l'immédiat, se parler;

- avancer sur le chemin d'une Europe fédérale (composée d'euro-régions, ou des états existants?).

Je ne sais plus qui a dit: "ce n'est pas le but qui compte, mais le chemin", mais je me souviens d'un proverbe coréen: "la Perfection est un chemin, non une fin"

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