La nouvelle nature des communautés d'agglomérations...

A l'occasion des élections des exécutifs dans les 3 intercommunalités les plus importantes du Pas-de-Calais, il s'est passé un phénomène étonnant, à savoir l'exclusion de 3 partis politiques des instances dirigeantes !

Cela  a commencé avec la Communauté d'Agglomération d'Hénin-Carvin (CAHC), dans laquelle la majorité de gauche (plus le maire de Noyelles-Godault) n'a pas voulu concéder à Hénin-Beaumont, ville administrée, désormais, par le Front National, un siège dans l'exécutif. Cela en vertu de la règle démocratique, puisque chaque poste dans l'exécutif (vice-présidents et conseillers délégués) a donné lieu à un vote. Qu'importe que la ville d'Hénin-Beaumont soit la ville-centre, la règle  "majorité/opposition" a joué, bien qu'elle n'ait jamais été appliquée dans le passé : il faut dire qu'un consensus policé régnait, la droite n'ayant jamais été représentée (mis à part avant 2008 avec la commune de Dourges), le Noyellois Jean Urbaniak étant, lui-même, un homme de consensus (il valait mieux, d'ailleurs, sinon il eut été ultra-minoritaire et son opposition eut été stérile). La gauche, spécialement le PS, n'a pas bougé le petit doigt ces dernières années, pour endiguer le FN sur HB et son opposition d'aujourd'hui parait bien tardive...

Dans la communauté d'agglomération voisine, celle de Lens-Liévin (CALL), où le maire de Lens (Sylvain Robert) succède au sulfureux maire de Liévin (JP Kucheida), ce sont les communistes qui ont été évincés. Il apparait que la majorité PS/MRC/Verts était disposée à leur laisser 4 vice-présidences, sous réserve de conditions, à savoir que le PC, pendant les 6 ans, devait voter le budget et ne pas proposer de candidat à l’élection du président de la CALL. Les socialistes refusaient également la disparition progressive de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères… Fin donc d’une union de la gauche qui durait depuis si longtemps, et 9 communes et 68 000 habitants n’auront pas de vice-président communiste à la CALL. La 3ème ville de l'Agglo (Avion) gérée par le PC n'a pas de vice-président...

Dans la communauté d’agglomération Béthune-Bruay (Artois Comm), c’est la droite (UMP et UDI) qui est exclue, à savoir la droite béthunoise : c’est elle qui a emporté la mairie de Béthune et ne dispose d’aucune des 15 vice-présidences. Comme à la CAHC, la ville-centre est éliminée et se retrouve dans l’opposition.

Certes, comme à la CALL, il y eut des tractations en coulisses, notamment par l’intermédiaire de Jacques Mellick, celui qui a permis à Olivier Gacquerre de devenir maire de Béthune. http://alpernalain.blogspot.fr/2014/04/bethune-et-henin-beaumont-quelle.html

Compensation ? O. Gacquerre a été élu président du Sivom du Béthunois, sans adversaire face à lui...

Qu'en conclure ?

- Les intercommunalités deviennent, au-delà de leur vocation d'être des instances de projet, des assemblées politiques dans lesquelles existent une majorité et une opposition, ce qui a été voulu par le législateur qui a, en effet, permis aux oppositions municipales d'être représentées. D'où l'entrée, principalement, de délégués communautaires FN.

- La gauche, et surtout le PS, a senti le boulet passer près d'elle lors des municipales, et les majorités socialistes, et plus généralement de gauche, ont voulu bloquer toute intrusion dans leur monopole dans l'ex-bassin minier, en rejetant tous ceux qui sont contre elles, dans l'opposition. Les Interco vont donc fonctionner comme les conseils municipaux dans lesquels une majorité décide en dehors de tout consensus...

- Si ces oppositions ne s'adaptent pas à ce nouveau fonctionnement, continueront-elles à participer et demanderont-elles un retrait de l'instance ? Outre que la tendance actuelle du gouvernement est que chaque commune fasse partie d'un regroupement communal, il serait malvenu pour les partis d'opposition de jouer la politique de la chaise vide s'ils veulent dans l'avenir briguer la majorité.

- Béthune et Hénin-Beaumont, villes-centre de leur agglo respective, ne participent pas aux exécutifs communautaires. Ce qui pouvait choquer, dans un premier temps, mais qui est bien dans l'esprit des regroupements tels qu'on les envisage aujourd'hui. Il faudra, dans l'avenir, pour ces villes, construire des majorités politiques, si elles souhaitent que leur commune assure le leadership. Tout en sachant que, durant ce mandat, elles pourront s'estimer lésées dans certains choix ou décisions, mais sans aucun moyen de recours...