Interview (imaginaire) de Nicolas Hulot

 Rappel: A un peu moins d'un an des élections présidentielles de 2012, il m'a paru intéressant d''imaginer des questions et réponses adressées à 12 hommes et femmes politiques qui seront directement ou indirectement engagés dans ces élections: N. Sarkozy, M. Aubry, JL Borloo, N. Hulot, M. Le Pen, JL Mélenchon, D. de Villepin, F. Hollande, F. Bayrou, S. Royal, F. Fillon, E. Joly.

AA: Monsieur Hulot, je rappellerai quelques souvenirs. Vous êtes un ch'ti, en quelque sorte, puisque vous êtes né à Lille. Vous seriez prédestiné à l'aventure puisque votre père fut, à un moment de sa vie, chercheur d'or au Venezuela. Vous dites que votre grand-père inspira Jacques Tati pour son légendaire personnage de Monsieur Hulot...Soit! Le 13 avril dernier vous avez annoncé votre candidature aux élections présidentielles de 2012, après avoir beaucoup tergiversé et finalement renoncé en 2007. Pourquoi cette candidature?

NH: Je suis candidat parce que je pense que l'urgence écologique n'est porté par aucun homme politique. Urgence écologique parce que les conditions climatiques ne nous permettent plus d'attendre une solution miracle et parce que nous sommes au bord de la 6 ème extinction des espèces sur terre, la dernière étant celle de la disparition des dinosaures...Je l'ai dit par ailleurs: je suis pour une société  de sobriété et je suis partisan de  l'« abondance frugale ». J'ai l'habitude de dire qu'il ne s'agit pas de supprimer voitures et avions, mais d'organiser la modération avant d'y être contraint.

AA: Pourquoi avoir voulu l'onction d'Europe-Ecologie-Les Verts et qu'allez-vous faire si Eva Loly emporte la primaire entre vous et elle?

NH: Je pense qu'il faut une structure porteuse lors de telles élections et comme à EELV nous sommes tous motivés pour les même raisons, je ne me sentirai pas seul. Quant à Eva Joly, je suis enchanté que nous puissions confronter nos idées: elle, plus portée sur les questions de justice et de droits de l'homme, moi plus environnementaliste...Nous sommes en fait très complémentaires et il est dommage que le système électoral français ne puisse permettre de constituer un ticket...

AA: Comme vous le savez, que ce soit chez les Verts ou dans les milieux associatifs écologistes, voire au delà, vous êtes critiqué. On vous reproche vos relations avec les grandes entreprises, notamment avec la nucléocrate EDF et l'Oréal, partisane de la vivisection, qui sont vos gros sponsors. Permettez-moi de citer cet extrait humoristique de Vincent Cheynet dans son livre "La décroissance":

« En fait, le diable en personne proposerait à Nicolas Hulot de figurer dans son comité de soutien en lui promettant de fermer le robinet en se lavant les dents que l'hélicologiste accepterait aussitôt. Ce qu'il y a de magique avec le Pacte écologique, c'est qu'il n'y a plus ni pollueurs ni pollués, ni droite ni gauche, ni bien ni mal, ni exploiteurs ni exploités, mais seulement des gentils consommateurs qui cliquent sur Internet pour sauver la planète ». Alors Nicolas Hulot, vous êtes celui, comme le rapporte un député Modem, qui "blanchit ou verdit dans votre Fondation l’argent des grands spéculateurs les plus pollueurs»?

NH: C'est très clair: la  Fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l'homme (reconnue d'utilité publique en 1996) n'a pas de sponsors, mais des mécènes. Ce n'est pas uniquement une différence juridique, mais dans les faits, la Fondation ne dépend de personne parce que les engagement financiers sont  à long terme et déconnectés des engagements politiques de Nicolas Hulot. En d'autres termes, je suis complètement indépendant. On m'accuse souvent d'être trop gentil: je suis effectivement un consensuel ferme. Ferme dans mes convictions, mais souple parce que l'on ne fait pas passer ses idées par la force! J'ai quand même réussi à faire insérer la Charte de l'environnement dans la Constitution!

AA: Justement, on vous dit ni de droite, ni de gauche...

NH: J'ai déjà déclaré que je ne retrouvais pas mes idées, mes convictions dans les projets portés par la droite...

AA: Mais vous avez soutenu JL Borloo et son Grenelle de l'Environnement et, dernièrement, vous déclariez avoir pensé, un moment, faire alliance avec lui!

NH: Mais je ne regrette pas cette passionnante idée du Grenelle. Rendez-vous compte que l'on a pu mettre autour de la table des gens aussi divers et opposés que des industriels et des écologistes purs et durs, des paysans et des représentants des industries chimiques, des nucléocrates et des partisans de la sortie du nucléaire, etc. Rien que cela était déjà une belle victoire. Je reconnais que les décisions prises tardent à s'appliquer. Pour être plus précis, on a mis en place le plus facile, ce qui ne coûtait que peu d'argent, le reste est, soit enterré, comme la taxe carbone, soit enlisé dans les commissions ou dans la bureaucratie: je ne suis pas très optimiste...Mais voilà une raison de se battre pour que tout cela soit mis en route...

AA:  Ces dernières semaines vous avez levé certaines ambiguïtés: vous voteriez pour un candidat de gauche au second tour s'il était opposé à N. Sarkozy. Vous vous êtes déclaré pour la sortie du nucléaire...Pensez-vous que c'est le prix à payer pour obtenir le soutien des Verts ou est-ce un réel changement d'opinion?

NH: Si j'étais opposé à Sarkozy au second tour, je voterais pour moi, comme le feront tous les gens qui se disent de gauche...Quant au nucléaire, vous avez ainsi ma réponse à votre question sur le mécénat d'EDF dans ma Fondation...

AA: Un peu langue de bois...