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Analyse
Elections régionales : les deux Partis  socialistes, par Jérôme Jaffré
 LE MONDE | 09.03.10 | 13h08
 u lendemain des élections  européennes de juin 2009, il était de bon ton de s'interroger sur la  mort prochaine du Parti socialiste, devenu une sorte de "grand  cadavre à la renverse". Moins d'un an plus tard, il paraît promis à  l'un des plus grands succès de son histoire. Il y a cependant une  illusion dans cette victoire attendue. Car il y a en fait deux Partis  socialistes. Le premier, appelons-le "le national", perd, depuis 2002,  toutes les élections portant sur les grands enjeux. Elimination au  premier tour de la présidentielle de 2002, suivie d'une lourde défaite  aux législatives. Défaite honorable, mais échec à la présidentielle de  2007, suivi d'une remontée insuffisante pour l'emporter aux  législatives. Enfin, défaite cinglante aux européennes de 2009.
u lendemain des élections  européennes de juin 2009, il était de bon ton de s'interroger sur la  mort prochaine du Parti socialiste, devenu une sorte de "grand  cadavre à la renverse". Moins d'un an plus tard, il paraît promis à  l'un des plus grands succès de son histoire. Il y a cependant une  illusion dans cette victoire attendue. Car il y a en fait deux Partis  socialistes. Le premier, appelons-le "le national", perd, depuis 2002,  toutes les élections portant sur les grands enjeux. Elimination au  premier tour de la présidentielle de 2002, suivie d'une lourde défaite  aux législatives. Défaite honorable, mais échec à la présidentielle de  2007, suivi d'une remontée insuffisante pour l'emporter aux  législatives. Enfin, défaite cinglante aux européennes de 2009.|  | 
Le second Parti socialiste, appelons-le "le local",  collectionne pour sa part les victoires dans toutes les élections depuis  2002. Succès aux régionales et aux cantonales de 2004, aux municipales  et aux cantonales de 2008 et triomphe annoncé aux régionales de 2010. Le  PS profite de l'exceptionnelle qualité de son réseau d'élus mis en  place et entretenu depuis la fin des années 1970. Il domine la droite et  écrase ses partenaires.
La force du parti "local" est étroitement  liée aux échecs à répétition du parti "national". Quand le PS occupait  l'Elysée ou Matignon, il perdait le plus souvent les élections locales,  comme aux régionales de 1992, qui se déroulaient alors à un seul tour à  la proportionnelle, où il ne réussit à conserver qu'une seule présidence  de région, celle du Limousin. A l'opposé, le PS, humilié par la droite  depuis huit ans dans tous les grands scrutins, espère cette année un  très grand succès. Mais ne cesse ainsi de s'accentuer une divergence  d'intérêts entre le "national" et ses présidentiables, désireux de  diriger le pays et le "local", où règnent en maîtres des élus bien à  l'abri du vote-sanction des élections intermédiaires.
Le fait  nouveau cette année est que la campagne du parti "national" a  complètement épousé la vision du parti "local". Aux européennes de 2009,  le PS avait mis en avant l'anti-sarkozysme et appelé au vote-sanction  contre le pouvoir. Sans succès, parce que les citoyens veulent qu'on  leur parle du sujet de l'élection - l'Europe - et que du Nouveau Parti  anticapitaliste (NPA) au MoDem, l'anti-sarkozysme ne parvenait plus à  discriminer entre ses différents porteurs.
Rien de tel aux  régionales de 2010. Ce sont les contre-pouvoirs que représentent les  régions qualifiées de "bouclier social" qui sont mis en avant ainsi que  le bilan des présidents de région sortants. S'il fallait une preuve de  ce refus voulu de nationaliser l'enjeu du scrutin des 14 et 21 mars,  l'absence dans cette campagne de tout mot d'ordre sur les retraites la  fournirait, alors que leur réforme annoncée par M. Sarkozy dominera  l'actualité des prochains mois.
Cet évitement des thèmes nationaux  contribue à l'atonie de la campagne électorale et à l'abstention  probablement très élevée. La victoire socialiste sera alors acquise dans  un climat d'indifférence et non de mobilisation. Par rapport aux  régionales de 2004, où 62 % des inscrits avaient pris part au vote, on  pourrait compter cinq millions d'électeurs en moins aux urnes. La droite  y puisera des arguments pour limiter la signification de sa défaite.  Mais la gauche devra reconnaître que l'abstention massive des jeunes et  des milieux populaires ne lui permet pas de proclamer une reconquête  sociologique.
Pour construire leur reconquête politique, les  socialistes devaient se servir des régionales comme d'un laboratoire en  vue de préparer 2012. Le bilan risque d'être mince. La domination  retrouvée du PS - même si c'est celle du parti "local" - ne l'incitera  pas à partager des circonscriptions législatives avec les écologistes  pour ancrer leurs principaux partenaires.
Le très faible score  attendu du MoDem ne permettra pas de préparer l'élargissement de la  gauche. Dans de nombreuses régions, avec moins de 5 % des suffrages  exprimés, le parti de François Bayrou sera éliminé sans gloire.  Ailleurs, les présidents de région socialistes, seuls maîtres de la  décision, mettront bien peu d'empressement à faire une place aux  centristes, alors même qu'ils devront sur ce point se battre avec leurs  camarades qui ne veulent pas céder la place, le Front de gauche qui s'y  oppose, et qu'eux-mêmes se jugeront assurés de leur réélection.
En  mettant en avant une logique de contre-pouvoir, le parti "national"  contribue à creuser lui-même la distance avec l'exercice du pouvoir au  niveau du pays. Il s'installe dans une sorte de cohabitation  territoriale où, fort de ses élus de proximité, il veut simplement  atténuer les effets de la politique de la droite.
Même  triomphales, les régionales ne régleront en rien les problèmes majeurs  du parti "national" : retrouver sa crédibilité gouvernementale et bâtir  une coalition assez large pour gagner le droit de gouverner durablement  le pays.
 
 
2 PARTIS SOCIALISTES UN DE GAUCHE, L AUTRE 14 EME CIRCONCRIPTION SOUTENANT LES AMATEURS. A GAUCHE TOUTE.
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