Considérations locales sur un scrutin régional à valeur nationale

Quelques considérations générales sur les élections régionales dont le premier tour a lieu dimanche, avant de parler du contexte local.

Sur le plan national, le Président de la République a bien fait de faire machine arrière (il a l'habitude...), lui qui disait, il y a quelques mois, qu'il  s'engagerait personnellement dans la campagne. Devant la catastrophe annoncée, il ne s'immisce plus directement, mais personne n'est dupe: c'est en grande partie sa personne qui est rejetée dans l'opinion. Restera pour lui à gérer les 2 ans qui restent avant les Présidentielles. Ce ne sera pas facile surtout si un Villepin vient surfer sur ses plate-bandes... A gauche, on prend les mêmes probablement, et on recommence, avec des élus écologistes  plus nombreux. Un bon bilan, M. Aubry sur une rampe de lancement pour 2012... Mais le PS, surpuissant au niveau des collectivités locales, est-il crédible au niveau national? 2 ans pour le prouver... Un peu court?

Au niveau du Nord-Pas-de-Calais (j'ai opté pour ces nombreux tirets, malgré la polémique actuelle qui voudrait que l'on écrive: Nord-Pas de Calais), victoire nette de la gauche annoncée avec une présence forte du Front de Gauche et d'Europe-Écologie. Est-ce de nature à modifier la gestion de la Région? Le bilan me semble bon, malgré les faibles moyens budgétaires: mais comment sortir de tous ces classements où nous flirtons avec la dernière place des régions (PIB, revenus, chômage, santé...)? Le FN devrait réitérer son score élevé de 18% (là, nous sommes première région en France), l'UMP se déliterait malgré une bonne tête de liste. Quant au Modem, il aura fait illusion quelque temps, mais le paradoxe est là: la France crève  de son bipartisme latent, mais est incapable de frayer un chemin à une 3ème voie...remarquons que c'est le cas également de l'Allemagne , de l'Angleterre et des États-Unis, autres pays où règne en maître le bipartisme..

A Hénin-Beaumont, quelles leçons tirerons-nous lundi des résultats locaux?

- Le FN dépassera-t-il les 40%? Dopés par l'absentéisme, il devrait profiter de l'absence totale de pouvoir municipal. Après 8 ans de règne monarchique catastrophique, marqués par une forte présence auprès des citoyens et une emprise totale sur la ville, HB n'a plus personne à sa tête, ses habitants sont méprisés et ignorés, la ville sombre, faute d'investissements et de projets. Le désespoir, alors qu'il aurait été si facile de susciter un minimum d'empathie envers les Héninois, jette les habitants dans les bras de l'abstention et du vote extrémiste (FN, surtout).

- Quel sera le score du PS à HB? La majorité "fantôme" actuelle  (il n'y a pas à s'étonner que la ville soit devenue, elle-même, fantomatique!) justifie sa carence par l'assainissement des finances. Bien sûr que les augmentations d'impôts et la quasi-tutelle de l'Etat contraignent à cet exercice, et bien sûr que, dans ces conditions, l'équilibre financier sera atteint. Mais il est fort probable qu'Hénin-Beaumont va , de ce fait "mourir en bonne santé". L'état dans lequel l'avait laissée le précédent maire justifiait que l'avenir fût préparé pendant les 2 ans d'austérité...L'urgence justifiait également que l'on se rapproche des habitants: les élus sont restés dans leur tour d'ivoire, et les habitants se sentent abandonnés (c'est le mot qui revient le plus souvent dans leur bouche).

Comme de plus, l'Alliance Républicaine (mérite-t-elle encore son nom?), a non seulement bafoué les valeurs républicaines (en copinant avec le FN) et s'est abstenue de gérer la ville, mais elle s'est, également, complètement discréditée aux yeux de ses électeurs. En effet, pendant des années, Daniel Duquenne et Georges Bouquillon se sont battus contre Gérard Dalongeville, en pourfendant, à juste titre, ceux qui le soutenaient (PS et MRC), et ils ont rallié les suffrages, aux municipales partielles de 2009, certes peu nombreux, de 20% des votants (soit un peu plus de 10% des électeurs inscrits), mais suffisants pour emporter le deuxième tour en obtenant les renforts, au second tour, de ceux qui ne voulaient pas du FN. On aurait pu penser qu'ils se seraient  alors lancés dans une politique de réconciliation avec ceux qui avaient les mêmes objectifs qu'eux, et qu'ils auraient mené une politique de reconstruction du lien social pour contrer l'hydre frontiste. Ils ont fait tout le contraire: ils se sont recroquevillés sur eux-mêmes, ignorant les uns et les autres (sauf le FN); summum de tout cela: l'un (GB) a immédiatement rejoint le MRC et l'autre (DD) vient d'appeler à voter pour la liste PS/MRC (et radical), alors que rien ne l'y obligeait! Ce dernier ralliement est non seulement douteux sur le plan éthique (appeler à voter pour son employeur, surtout quand on retourne sa veste, laisse place à toutes sortes d'interprétations) mais il bafoue les électeurs qui ont cru à l'indépendance de l'AR, sans parler de la claque aux  militants et colistiers. Il est bien malheureux que le jeu favori actuel, en ville, soit de rappeler les paroles ou écrits de GB et DD dénonçant les soutiens de leurs nouveaux parrains à G.Dalongeville... Comment voulez-vous que les gens croient encore à la politique!

On peut donc penser que le résultat héninois de la liste PS/MRC reflétera le degré de crédibilité de la majorité municipale. Cette liste annoncée à 25/27% dans le NPDC réussira- t-elle le même score à HB? Dans l'affirmative, on peut penser que les électeurs auront largement renouvelé leur confiance au Maire. A 20%, c'est le statu-quo (mais quelle claque pour le PS!). A 15%, c'est un désaveu, non seulement du PS/MRC (qui, ne l'oublions pas, a "fait" Dalongeville), mais de la majorité municipale actuelle...

- quant aux scores des autres listes: s'ils diffèrent de ceux régionaux, pourra-t-on en tirer des conclusions, tellement le débat à HB est atypique? .Il est même fort probable que certaines candidatures bénéficient d'un vote refuge (LO, NPA, Front de Gauche).

- quel sera le taux d'abstention?A HB, il sera un des plus élevés du NPDC  et reflètera le mépris, envers la politique, de ceux qui ne veulent pas adhérer au système, sans parler des jeunes qui ne se sentent pas concernés par ces élections, et de ceux qui ne se retrouvent pas dans la vie citoyenne.

En conclusion, 3 indicateurs héninois à vérifier dimanche soir:

- le résultat du FN: à plus de 40%, il y a fort à craindre lors de la prochaine élection municipale;

- le résultat de la liste PS/MRC: à moins de 20%, l'AR est désavouée;

- le taux d'abstention supérieur à celui de la Région: qui fera le travail nécessaire pour reconstruire le lien social?