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lundi 27 juin 2016

Le peuple a-t-il toujours raison ?

2 référendums viennent d'avoir lieu : au Royaume-Uni, la majorité a voté pour la sortie de l'Union Européenne, et, en Loire-Atlantique, les citoyens se sont prononcés pour la construction d'un nouvel aéroport.
Dans l'un et l'autre cas, rien n'oblige, constitutionnellement, les gouvernements à prendre en compte les avis des citoyens. Mais, les exécutifs britannique et français avaient annoncé qu'ils tiendraient compte des résultats de ces 2 consultations. Cameron, le premier Ministre anglais, la mort dans l'âme, Valls, son homologue français, le baume au cœur... 
Il ne s'agit pas ici de remettre en cause ce pour quoi les majorités ont voté, mais de se poser quelques questions sur l'exercice de notre démocratie... Je rappelle ce que j'écrivais plus haut, à savoir que les référendums n'ont qu'une valeur consultative. Il pourrait en être autrement, mais aucun pays dit démocratique n'a franchi le pas... Même en Suisse, les "votations" n'ont lieu que sur des questions de société. Les 2 référendums dont il est ici question n'engagent les pouvoirs politiques que parce que ces derniers ont dit, préalablement, qu'ils respecteraient les résultats...
Sinon, les systèmes dits démocratiques s'exercent par des décisions majoritaires des représentants du peuple. Pourquoi ? Non seulement parce que la méthode du référendum pose des problèmes d'organisation (qu'Internet peut résoudre aujourd'hui), mais surtout parce que poser une question concise aux citoyens recèle deux difficultés : l'une concerne la quasi-impossibilité d'exprimer, en une question sèche, la complexité d'un sujet, la seconde réside dans le fait que la réponse à la consultation peut avoir une connotation politique, à savoir un soutien ou un rejet de celui qui pose la question...
En fait, les pouvoirs politiques se méfient de leur population qu'ils pensent incapable de répondre à une question trop complexe ou de réagir passionnellement plutôt que rationnellement. On doute donc du peuple et c'est pourquoi le choix de la démocratie représentative a été fait, les parlementaires étant supposés consulter leurs mandants, avant de légiférer...
Et il est vrai que l'un et l'autre des référendums de ces derniers jours posent des questions qu'une simple réponse positive ou négative ne peut rendre satisfaisante. Ainsi :
- peut-on, comme le rappelait Dany Cohn-Bendit, prendre une décision aussi irréversible que le Brexit engageant l'avenir du pays, alors que la majorité des jeunes ont voté contre ? Est-il démocratique que l'Ecosse, qui a voté contre la sortie de l'Union européenne, soit entraînée, malgré elle, hors de l'Europe ? Est-il satisfaisant que 52% des ressortissants d'un pays imposent leur décision à 48% de leurs concitoyens, dans une décision d'une telle importance et sur laquelle on ne pourra jamais revenir ?
- n'est-il pas contradictoire que la France qui s'est montrée à la pointe de la lutte contre les changements climatiques prenne une décision aussi contradictoire que la construction d'un aéroport, bouffeur d'énergie carbonée et dévoreur de zones humides, alors que le projet est très controversé ? Encore une fois, se rend-on compte qu'il s'agit d'une décision irréversible ? 

Bien sûr, la majorité d'entre nous ne sera pas là pour répondre à nos descendants qui poseront la question de savoir pourquoi nous avons pris, en juin 2016, des décisions aussi irresponsables... 

mercredi 16 septembre 2015

Une déclaration humaniste...


A un moment où la complexité des problèmes soulevés par les flux migratoires donne lieu à un déferlement de haines de l'Autre, comme jamais vu depuis les années 30, des organisations maçonniques européennes viennent de publier une déclaration qui me semble apporter un regard humaniste dans le débat actuel. N'écoutons pas ceux qui nous entraînent vers des ténèbres catastrophiques et écoutons plutôt ceux qui nous font entrevoir un peu de lumière...

Déclaration des Obédiences Européennes sur la situation des migrants, signée le 07 septembre 2015 par 28 Obédiences

"Les Obédiences maçonniques européennes alarmées par la tragédie vécue par les migrants qui fuient des pays en guerre et en proie à la misère en appellent aux gouvernements européens pour qu’ils mettent en œuvre les politiques communes indispensables à un accueil digne et humain de populations en détresse et en péril. L’incapacité des Etats à surmonter les égoïsmes nationaux est un nouveau signal d’une Europe malade où le chacun pour soi l’emporte sur l’intérêt général.
Les Obédiences maçonniques européennes rappellent que le respect des droits de l’homme et du principe de dignité humaine font partie des principes fondateurs de la construction européenne. C’est sur la base de tels principes que la solidarité entre les nations s’est mise en place. L’esprit de solidarité est encore plus nécessaire au vu des bouleversements qui affectent de nombreuses régions du monde.
Sans revenir sur l’histoire d’un continent qui s’est forgé au gré de nombreuses migrations, les drames présents doivent provoquer une prise de conscience et insuffler des politiques d’accueil innovantes. A défaut, le continent européen sera à terme le théâtre de divisions et de conflits qui précipiteront les peuples dans un nouveau malheur. Il n’en résultera qu’une nouvelle exacerbation des nationalismes.
La tragédie présente doit donc être le creuset d’une renaissance et d’un renouveau du rêve européen. Les Obédiences maçonniques signataires attendent désormais des actes dans lesquels les valeurs de solidarité et de fraternité fondatrices de l’Europe y trouvent leur juste expression.

Les Obédiences signataires sont françaises (8), belges (5), portugaises (2), grecques (2), ainsi qu'une Obédience de chaque pays suivant : Autriche, Croatie, Espagne, Irlande, Italie, Luxembourg, Pologne, Roumanie, Suisse, Turquie. S'y ajoute une "Association Adogmatique d’Europe Centrale " (Pologne, Hongrie, Roumanie, Slovénie).

Cette déclaration rappelle que les principes fondateurs de l'Europe sont la solidarité, la fraternité et la dignité. C'est pour cela que l'Europe, construite par des vagues de migrations successives, a été mise en place pour traiter de problèmes que chaque nation, isolément, est incapable de traiter. Aujourd'hui, l'Europe est malade et des solutions européennes sur la situation des migrants sont une occasion unique pour agir selon les valeurs fondatrices (solidarité, fraternité, dignité). Les mouvements d'extrême droite œuvrent au grand jour pour faire capoter cette grande espérance qu'est l'Europe. Nous ne savons que trop ce à quoi ont mené les nationalismes des siècles précédents. Nous ne voulons plus de guerre entre pays européens et 58 ans après le traité de Rome fondateur de ce qui est devenue l'Union européenne, la paix règne, "entre les hommes", en Europe. Ne laissons pas les chiens de l'extrême-droite dévorer notre solidarité européenne sous prétexte de pureté nationale : nous avons déjà donné et payé ! 
La déclaration évoquée propose d'insuffler "des politiques d'accueil innovantes". C'est l'Europe et non chacun de ses membres, seul, qui peut les imaginer et surtout les mettre en place. N'écoutons pas les incendiaires ! 




vendredi 4 septembre 2015

J'ai foi en l'Homme et en l'Europe. J'abhorre ceux qui propagent la haine et le racisme






Cette affiche placardée dans une ville française, là où naquit Jean Jaurès, assassiné quelques semaines plus tôt, nous rappelle que la France a, depuis longtemps, été terre de refuge. Les idéaux de la Révolution française, la défense des droits de l'Homme ont fait de notre pays un phare pour tous ceux qui souffrent, que ce soit de faim ou d'atteinte à leurs droits d'expression. 
En 1914, mais à d'autres époques aussi, on recevait les réfugiés ou les migrants. D'ailleurs, le maire de Castres va plus loin en demandant à ses administrés d'accueillir, chez eux, les réfugiés belges dont la municipalité a pu "assurer l'hospitalité pendant 2 ou 3 jours". 
La France et l'Europe, en 2015, sont confrontés à un afflux de réfugiés et de migrants fuyant leur pays d'origine, pour des raisons politiques ou économiques. Politiquement, on sait que la guerre civile ou les exactions de l'Etat islamique ont jeté sur les routes ceux qui sont menacés de mort, de conversion forcée ou autres ignominies. Le droit d'asile, que nous sommes tenus d'accorder, s'applique à ces personnes. Une fois la paix acquise dans leur pays d'origine, ces personnes là repartent chez eux, dans la très grande majorité des cas. Certes, il n'est pas toujours facile de prouver que sa vie est menacée et certains essayent de cacher qu'ils sont des migrants économiques. Bref, la France, comme d'autres pays européens (ou proches des zones troublées) est confrontée à un afflux de malheureux en quête d'une vie meilleure, même temporairement. A noter que ce n'est pas en France que les arrivées sont les plus nombreuses : le Liban, l'Allemagne, l'Italie, la Grèce, la Hongrie, notamment, font face à des drames quotidiens, sans parler des pays scandinaves qui, proportionnellement à leur population, sont les plus accueillants.
Dans ce débat passionnel, je voudrais faire quelques remarques :
- certains se réclament de l'héritage chrétien de la France et oublient pourtant le message évangélique de solidarité avec l'étranger... Les mêmes propagent des peurs moyenâgeuses pour dresser la population française (souvent les plus fragiles, mais pas que...) contre "l'invasion". On connait les ritournelles : "on ne peut accueillir toute la misère du monde ", en se référant de façon tronquée à une déclaration de Michel Rocard qui avait ajouté "mais elle doit y prendre toute sa part". On lit également en réponse aux paroles de ceux qui sont émus par le drame humain qui se joue devant nous : "mais prenez-les chez vous, si vous voulez tant les aider !" Je passe sur le racisme ordinaire décliné sous toutes ses formes. Et je me félicite tous les jours et, encore plus en ce moment, que la France ne soit pas dirigée par le clan Le Pen !
- il est clair que la réponse à l'arrivée de ces flots de malheureux, ne peut être qu'européenne. Non seulement pour gérer et répartir les demandeurs d'asile entre les états-membres (ce qui suppose un effort financier important), mais également pour trouver des solutions aux problèmes à l'origine de ces déplacements de population. Solutions qui peuvent être politiques, économiques ou militaires, mais doivent être concertées et porter la voix de l'Europe. Ce n'est pas en fermant ses frontières ou en renvoyant les gens que l'on résoudra le problème ! Bien entendu, l'Europe doit intervenir aux frontières de l'espace Schengen pour ne pas laisser à certains pays la charge de gérer les "entrées". 
- la France, dans le cadre de la concertation avec ses alliés européens, devra prendre sa juste part. L'Etat et les collectivités locales, aidées par ces extraordinaires associations composées de bénévoles qui font honneur aux valeurs humanistes, doivent, comme l'a fait Castres, sans moyen, en 1914, accueillir nos "Frères humains" ("La Ballade des pendus" François Villon). 


vendredi 7 août 2015

France, ci-devant défenseur de la Liberté et des Droits de l'Homme, relève la tête avant qu'il ne soit trop tard !

Il y a des fois où je me dis que j'aurais aimé avoir écrit tel ou tel texte que je viens de lire. C'est le cas du post ci-dessous. Non, la France n'est pas envahie par les migrants et même nous en accueillons moins que les autres ! Il est piquant de constater que ce sont ceux qui parlent de "la grandeur de la France" qui brandissent le drapeau de "la France assiégée"". Lisez ce qui suit et vous comprendrez que ce sont ceux dont c'est le fonds de commerce de prôner la haine de l'autre, ainsi que ceux dont la démagogie et la bêtise montrent qu'ils n'attendent qu'un signal pour les rejoindre, ce sont tous ceux-là qui salissent l'image de la France, en rabaissant notre pays au niveau des pays les plus étriqués concernant la défense des droits de l'Homme. Pauvre France, si longtemps héraut de la Liberté... Il est temps de rétablir la vérité pour que notre honneur ne soit pas plus longtemps bafoué. Jusqu'où faudra-t-il sombrer pour que nous comprenions que nous faisons fausse route en suivant celle que le FN et les autres tentent de nous faire emprunter. Ressaisissons-nous !


A ceux qui me répètent qu’on ne peut pas accueillir “toute la misère du monde”.

Parce que je n'en peux plus d'entendre, à chaque fois que je dis que je travaille dans l’accompagnement des demandeurs d’asile “Mais il sont vraiment trop nombreux, non ?” “Déjà que la France est un des pays les plus généreux en Europe ...” et autres “La France ne peut pas  accueillir toute la misère du monde"... j'ai décidé d’écrire ce texte, pour contenir ma frustration, mon indignation qui croît chaque jour en entendant les politiques nous abreuver de chiffres hors contexte censés nous démontrer que nous sommes une forteresse assiégée, et contenir ma tristesse de voir notre gouvernement de “gauche” si tétanisé par l’influence de l’extrême droite dans le champ politique qu'il finit par rentrer dans son jeu ...
Je comprends que les gens finissent par s'y perdre et par se demander si, vraiment, on accueille trop de demandeurs d’asile en France.
Alors déjà pour ceux qui me citent la fameuse phrase de Rocard, il ne faudrait tout de même pas en oublier la seconde partie : « La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, mais elle doit en prendre sa part ».

Et pour ce qui est de prendre sa part, on va le voir, malgré son image de pays des Droits de l’Homme, la France est loin d´être exemplaire.

En ce qui concerne les demandeurs d'asile – c’est à dire des personnes ayant fui leur pays parce qu’elles y ont subi des persécutions ou craignent  d’en subir et qui sont en quête d’une protection internationale – la France a enregistré 62800 demandes d’asile en 2014, loin derriere les Etats-Unis (88400) ou d’autres pays d’Europe comme l’Allemagne par exemple (202 700 demandeurs), la Suede (81200) ou l'Italie (64600)1.  

Et si on rapporte ce chiffre a la proportion de la population de chaque État membre de l’UE, ce qui est plus significatif, les taux les plus élevés de demandeurs ont été enregistrés en Suède (8,4 demandeurs d’asile pour mille habitants), devant la Hongrie (4,3), l’Autriche (3,3), Malte (3,2), le Danemark (2,6) et l’Allemagne (2,5). La France n’arrive qu’en douzième position (1 demandeur d’asile pour mille habitant).
La France est donc loin de “ployer” sous le poids des demandes comme on ne cesse de nous le répéter.

La France n’est pas non plus le pays qui accorde le plus de statuts de réfugié (ce qui constitue l’aboutissement “positif” de la demande d’asile) : en 2014, dans l’UE, 45% des demandes d’asile ont été reconnues positives. Le taux d’accord en France pour 2014 était quand a lui de 28%3. Donc pour la France si génereuse, on repassera.

Et si on regarde au niveau mondial, quel est selon vous, le pays qui accueille le plus de réfugiés ?
Ca doit être en Europe pour qu’on nous répète inlassablement que c’est un si lourd fardeau ... Et bien non, figurez vous!  C’est le Pakistan qui arrive en tête des statistiques du HCR (l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés), avec 1,6 million de réfugiés, suivi de l’Iran avec 857 000 réfugiés  et du Liban qui en compte 856 000.
Le Liban a, sur son sol, 178 réfugiés pour 1 000 habitants, ce qui, rapporté à la France, donnerait quelque 12 à 15 millions... Or, on estime à environ 165 000 le nombre de personnes disposant du statut de réfugié politique en France (0,29% de la population). C’est une goutte d’eau, nous sommes tout à fait en capacité de les accueillir.

Contrairement aux idées reçues, ce sont les pays en développement qui reçoivent la majorité des personnes en demande de protection – 90% des demandeurs d’asile et des réfugiés vont dans des pays proches ou frontaliers, donc l’Europe n’est absolument pas la zone du monde la plus affectée. Par rapport à la situation des réfugiés syriens par exemple, l'exemple est flagrant.Alors que le nombre de déplacés va bientôt atteindre la barre des 4 millions, l'ONU a demandé que 30.000 d'entre eux soient « réinstallés » dans des pays occidentaux. L’Allemagne a promis d’en accueillir 20000, la Suède 1200, la France, devinez combien?........500. L’immense majorité de ceux-ci (97%) s’installent au Liban, en Jordanie, en Turquie ou en Irak. Nous sommes loin d’être envahis. Le monde entier ne rêve pas de rejoindre l'Europe. Relisez les chiffres ci-dessus pour comprendre à quel point c’est faux.
De plus, on réduit le migrant à son statut de migrant, comme si l’unique but de sa vie était de venir frapper à notre porte, mais derrière chaque demande d’asile se cache un homme ou une femme avec son histoire, son passé, un homme ou une femme qui a grandi quelque part, a eu une enfance, a des attaches, un endroit où il s’est sentí chez lui. Je me souviens de ce Monsieur tchétchéne qui m’évoquait les larmes aux yeux les montagnes de son enfance, car jamais il n’aurait pensé ne pas vieillir a leurs pieds ou de ce Monsieur bangladais qui s’était effondré dans mon bureau car il venait d’apprendre la mort de son père au pays et savait qu’il ne pourrait même pas lui rendre un dernier hommage… Qui voudrait vivre ca ? Franchement, qui ? Sans parler des trajets abominables pour atteindre l’Europe tristement illustrés par les récents  naufrages en Mediterannée…

Vous pensez que quand on vient de pays comme la Somalie ou l’Erythrée on vient parce que le système d’allocations est plus avantageux en France que chez soi ? Il faut arrêter la plaisanterie, imaginez un instant ce que cela représente de tout quitter et vous comprendrez qu’on part parce qu’on n’a pas le choix.

Vous voudriez vous, rester dans un Etat où règne la terreur, la guerre, où vous avez peur chaque jour pour vos enfants ? Un Monsieur sri-lankais que je suivais et qui dormait dehors faute de solution d’hébérgement m’a dit un jour “C’est tres dur. Mais au moins ici je suis libre et je n’ai plus peur en permanence.”
Renseignez-vous sur les régimes politiques en Somalie ou en République Démocratique du Congo, demandez-vous si vous resteriez en Syrie dans la situation actuelle. Ou en Russie si vous êtes menacé de mort parce que vous avez écrit un texte qui déplaît aux autorités. En Guinée où votre fille se ferait potentiellement exciser comme vous dès le plus jeune âge.
L’espoir d’une vie meilleure est équitablement partagé sur notre planête et ne nous est pas réservé parce que nous sommes né du bon coté de la barrière.

Plus généralement, l'immigration est toujours présentée comme un problème, alors même que de nombreuses études indiquent que l’immigration est positive pour l’Etat francais, en termes démographiques, en termes de croissance, de savoir, de diversité et qu’elle rapporte même de l’argent (12 milliards par an tout de même selon une équipe de chercheurs de l’Université de Lille)5. C’est donc le regard médiatico-politique sur les migrants qu’il faut réussir à changer. Et ne pas céder aux discours populistes qui prospèrent à l’aune de la montée du Front National qui trouve là un terrain fertile en ces temps de récession économique.

Nos démocraties peuvent tout à fait accueillir ces migrants, et au lieu de succomber à un populisme mortifère, devraient réflechir à une politique migratoire de maniere plus sereine et apaisée et arrêter de faire des migrants les boucs émissaire de nos sociétés.

Sinon c'est notre humanité qu'on perd peu à peu.


1- Chiffres Eurostat
2- Chiffres Ofpra
3- Chiffres Ofpra
4-  A ce propos, lire le magnifique livre de Fabrizio Gatti “Bilal sur la route des clandestins”, ed. Liana Levi, 2008.
5-Courrier international, Les très bons comptes de l’immigration, 27/04/2012

mercredi 5 août 2015

Marre du Taubirabashing !

Comme d'habitude, une annonce de Christiane Taubira a mis le feu aux poudres. Comme d'habitude, la mesure proposée par la ministre de la justice était pleine de bon sens et efficace. Comme d'habitude, l'opposition politique de droite a brandi son étendard de la critique pour la critique, les associations corporatistes ont voulu prouver qu'elles existaient et les râleurs ont pu une nouvelle fois râler. Comme d'habitude, tout ce beau (?) monde a "cassé" du Taubira, sans réfléchir, comme si c'était un réflexe conditionné. 
Comme d'habitude, nous sommes nombreux à soutenir Madame Taubira, dont on finit par se demander si le torrent de bêtises déversées à son encontre ne relève pas de la jalousie : cette femme est intelligente, éloquente et pleine de bon sens, cultivée et noire, toutes caractéristiques qui hérissent le poil d'un tas de personnes mal intentionnées.
Tout cela est d'autant plus "agaçant" que d'autres mesures prévues dans la loi ontété passées sous silence alors qu'elles présentent de louables avancées... 


Le Monde  2/8/2015

La fausse querelle des délits routiers

Avant même de présenter son texte, vendredi 31  juillet, en conseil des ministres, et après la lecture de trois communiqués indignés, Christiane Taubira a fait marche arrière. La garde des sceaux proposait de rationaliser la répression des conduites sans permis ou sans assurance, et, devant le tollé, a indiqué dès vendredi matin, sur France Inter, que, " s'il n'y a pas d'acceptabilité dans la société, nous en tirerons tous les enseignements ". Le premier ministre, Manuel Valls, à son tour s'est dit ouvert au dialogue, " sur ce sujet comme sur les autres ".

La mesure est pourtant de bon sens, et cache l'essentiel des avancées d'un projet de loi qui touche directement la vie quotidienne des Français : 70  % des justiciables ne sont ni victimes ni délinquants et n'ont affaire à la justice que pour un pacs, un divorce, un problème avec un voisin ou une entreprise ; le texte simplifie vigoureusement les démarches pour faire enfin de la justice  un " service public ".
Aujourd'hui, le défaut de permis ou d'assurance est un délit, puni d'un maximum d'un an de prison et de 15 000  euros d'amende. Lourde peine, mais en trompe-l'œil : les 34 000 condamnations annuelles pour défaut de permis ne donnent en réalité lieu qu'à une simple amende de 414  euros en moyenne dans la moitié des cas, voire de 289  euros devant un procureur, ou de 469  euros devant un tribunal – et dix mois plus tard.

Les amendes sont aussi très variables selon les régions, de 150 à 1017 euros. Le défaut d'assurance (30 000 condamnations chaque année) est puni d'amendes de 178 à 701  euros (308  euros dans 70 % des cas), et il faut attendre plus de quatorze mois pour passer au tribunal. La chancellerie propose ainsi de transformer ces seules infractions en contraventions : le défaut de permis ou d'assurance, lorsque c'est la première fois, sera puni d'une amende de 500  euros – minorée à 400  euros si elle est payée dans les quinze jours, majorée à 750  euros au-delà de quarante-cinq jours. Ce traitement automatisé par procès-verbal électronique, immédiat et uniforme, ne s'appliquera ni aux chauffeurs de car ou de camion, ni aux récidivistes, ni en cas d'une autre infraction : excès de vitesse, défaut de ceinture de sécurité, alcoolémie. Ces contrevenants seront renvoyés, comme aujourd'hui, devant le tribunal – avec un doublement des peines pour le défaut de permis.

Avancées significatives
La Ligue contre la violence routière juge le texte " calamiteux " et " pathétique " ; l'association 40 millions d'automobilistes " incompréhensible " et " stupide " ; l'avocat spécialiste du droit routier Rémy Josseaume " irresponsable " et " pousse-au-crime " ; Hervé Mariton (Les Républicains) déplore la " légèreté coupable " du gouvernement ; Chantal Jouanno (UDI) assure que tout cela est " absolument catastrophique ".
Christiane Taubira a cependant présenté deux textes, vendredi : un projet de loi organique sur le statut des magistrats, et une loi ordinaire, pour " rapprocher la justice du citoyen ". La loi organique contient quelques avancées significatives : les procureurs généraux ne seront plus nommés en conseil des ministres, les juges des libertés et de la détention, qui pouvaient être évincés sur la simple décision d'un président de tribunal, seront nommés, comme les juges d'instruction, par décret du président de la République ; le droit de grève des magistrats, autorisé depuis 1972 par le Conseil d'Etat, sera inscrit dans la loi ; les plus hauts magistrats, comme les hommes politiques, devront faire une déclaration de patrimoine.

Le plus intéressant est sans doute le projet pour " la justice du XXIe  siècle ", un grand chantier lancé il y a deux ans, dont le compromis final déçoit évidemment les professionnels – " de grandes ambitions pour un faible résultat ", indique l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire). Le texte crée " un service d'accueil unique  des justiciables " qui devrait grandement simplifier l'accès aux juges.
Exemple : une femme seule avec enfants ne reçoit plus sa pension alimentaire et ne peut plus payer son loyer, a des soucis avec la Sécurité sociale et vient d'être licenciée. Il lui faut, pour trouver un accord avec son propriétaire, aller devant le tribunal d'instance, pour contester son licenciement devant les prud'hommes, pour ses allocations faire trancher le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) et pour porter plainte contre son mari saisir le procureur.
Si elle habite à Annonay (Ardèche), elle est à 106  km du TASS et du tribunal de grande instance (la moitié des Français ne fait pas la différence entre tribunal d'instance et de grande instance).
Elle pourra désormais s'adresser au greffe du tribunal d'Annonay, qui fera suivre tous ses dossiers aux juridictions intéressés. Des expérimentations ont été lancées à Privas et cinq autres juridictions, et, à terme, on pourra même suivre son dossier par Internet. Du même coup, le statut des greffiers est élargi et consolidé.

Autres mesures fortes, l'action de groupe, dont les règles vont être harmonisées et étendues aux discriminations, les juridictions sociales, où tout le monde se perd, vont être fusionnées : les 115 TASS vont fusionner avec les 26 tribunaux du contentieux de l'incapacité dans un pôle social du tribunal, la médiation et la conciliation vont être développées ; la signature d'un pacs ne se fera plus au tribunal mais à la mairie, chargée de l'état civil. L'affaire du défaut de permis ne devrait pas changer grand-chose pour le citoyen, le reste du projet est en revanche un pas sérieux en avant.

dimanche 14 juin 2015

Une justice indépendante et une presse objective : deux piliers de la démocratie.

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L’affaire du Carlton et les vertus du procès
LE MONDE | 13.06.2015


Editorial du « Monde». 
Me Henri Leclerc, l’une des consciences du monde judiciaire – et l’un des avocats de Dominique Strauss-Kahn – a bien posé le problème : « Cette affaire, ce tapage immense autour de cette affaire, est quelque chose qui devrait donner à tous à réfléchir. » L’ancien président du FMI, jugé pour « proxénétisme aggravé », accusation infamante s’il en est, a en effet été relaxé, vendredi 12 juin, par le tribunal correctionnel de Lille, comme douze des treize autres prévenus dans cette affaire du Carlton de Lille. Le tout assorti de quelques considérations peu amènes sur les juges d’instruction.
Si l’on ajoute la relaxe récente d’Eric Woerth, ancien trésorier de l’UMP et ancien ministre, dans l’affaire Bettencourt, et l’ahurissant procès de Daniel Legrand, innocenté à deux reprises dans l’affaire Outreau, il y a, effectivement, de quoi réfléchir.
« Charges suffisantes »
La justice française juge 600 000 délits par an et les juges d’instruction traitent moins de 4 % de ces dossiers. L’affaire du Carlton est-elle un désastre judiciaire ? Les choses sont moins simples qu’il n’y paraît. Les juges d’instruction ont pour mission d’évaluer s’il existe contre une personne des « indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elle ait pu participer à la commission des infractions ». Au tribunal ensuite de décider si ces indices sont des « charges suffisantes ». Faute de preuves, le prévenu est relaxé, car, depuis 1789, et c’est heureux, « tout homme est présumé innocent ».

Le système est évidemment faillible, et il existe des juges d’instruction incompétents. Faut-il pour autant renoncer à juger des dossiers qu’on pressent fragiles ? Non. D’ailleurs, qui en déciderait ? Le regard du président du tribunal et de ses deux assesseurs, qui n’ont pas, eux, travaillé des années sur l’affaire, n’est-il pas nécessaire ? Et la confrontation générale et solennelle de l’audience publique n’a-t-elle pas quelque vertu ? Au risque, certes, de désavouer les magistrats instructeurs. En ce sens, l’affaire DSK n’est pas un raté procédural, mais une vérité judiciaire.
Deux autres débats se greffent sur celui-là. Le rôle de la presse, bien sûr, qui a « livré aux chiens l’honneur d’un homme », selon la formule de François Mitterrand après le suicide de Pierre Bérégovoy. Les témoignages contre DSK, s’ils n’ont pas entraîné de condamnations, étaient-ils mensongers pour autant ? Fallait-il en cacher le contenu ? Les avocats de M. Strauss-Kahn pensent que oui, puisqu’ils ont porté plainte pour recel de violation du secret de l’instruction contre cinq journaux, dont Le Monde. Mais si elle s’était tue, la presse aurait été soupçonnée de protéger un homme politique, précisément parce qu’il était puissant. La Cour européenne des droits de l’homme a fait des journalistes « les chiens de garde de la démocratie ». Rien ne démontre qu’ils soient sortis de ce cadre.
Quant à notre organisation judiciaire, elle a incontestablement besoin d’une refonte profonde. Mais le modèle du juge d’instruction, symbole du magistrat indépendant, restera le moins mauvais système que l’on puisse imaginer, tant que le parquet – les procureurs –, qui gère l’énorme majorité du contentieux, ne sera pas statutairement indépendant. De droite comme de gauche, le pouvoir exécutif l’a bien envisagé, de façon sporadique, depuis vingt ans. Mais il n’a jamais eu le courage de sauter le pas. Quand bien même il l’aurait fait, cela ne serait pas une garantie ultime contre les égarements des magistrats qui enquêtent. Le procès reste le meilleur rempart contre les erreurs judiciaires.



AA :
- On ne peut pas se passer lors d’un procès du regard d’un homme indépendant qui a pesé le pour et le contre (« à charge et à décharge ») dans une enquête qu’il a menée. Certes, si les procureurs étaient indépendants du pouvoir, ils pourraient jouer ce rôle. Mais les gouvernants ont tellement peur de perdre la main sur ceux qu’ils nomment…
- Le rôle de la presse est bien celui du 4ème pouvoir, garant de l’équilibre des autres pouvoirs. La presse est une lanceuse d’alerte, comme elle constitue également une enquêtrice primordiale. Mais la presse prédatrice et en quête de sensationnalisme nuit aux fonctions précédentes. Elle, seule, peut se tempérer et on doit lui faire confiance, sinon on sape les fondements de la démocratie…  

lundi 11 mai 2015

Ras-le-bol de la haine de l’Autre !


A l'occasion du voyage de François Hollande dans les Antilles (et à Cuba, ce jour), on a parlé de précampagne électorale. C’est vrai que François H se plaît là-bas. L’exubérance de la population locale est extraordinaire et l’on comprend qu’il ait eu besoin de cette chaleur humaine pour digérer l’amertume des Métropolitains à son égard. On a beaucoup parlé, pendant son séjour, notamment à l’occasion de l’inauguration d’un mémorial sur la traite des noirs, du droit à l’indemnisation des descendants de ceux qui furent transplantés d’Afrique vers le Nouveau Monde, entre le XVIème et le XVIIIème siècle : la traversée fut dantesque et la vie des esclaves sur place inhumaine. Mais, qui indemniser ? Et, surtout, qui devrait payer ? En effet, les négriers « blancs » de tous pays furent bien aidés sur place par les Noirs et les Arabes. On peut, néanmoins, imaginer un geste symbolique très fort pour que les dizaines de millions de descendants de ces malheureux y trouvent partiellement leur compte et, surtout, que ce soit l’occasion pour nos générations, et particulièrement les jeunes, de se rendre compte de ce que les hommes sont capables de faire à d’autres hommes au nom de l’argent.
L’argent a toujours été un moyen d’exploiter l’Autre. Mais les religions (et les idéologies) le sont tout autant. Les Croisés ont tenté de soumettre les Infidèles (musulmans pour la plupart), tout en massacrant sur leur chemin les communautés juives (en Allemagne principalement). L’Inquisition sévit en France, en Espagne et au Portugal pour soumettre les hérétiques, en les tuant ou en les convertissant (pas seulement les Juifs, d’ailleurs, même s’ils furent les plus nombreuses victimes, mais il y eut aussi les Cathares). On se souvient également des guerres de religion franco-françaises entre Catholiques et Protestants…
Aujourd’hui, des mouvements djihadistes (appelés également islamistes ou terroristes) sèment la mort parmi les Musulmans, mais des non-Musulmans sont également massacrés au nom du Coran. Ces hordes veulent frapper ceux qui n'appliquent pas la Charia et les Occidentaux aux mœurs réprouvées, mais aussi les Juifs qu’ils appellent sionistes pour n’être pas taxés d’antisémites. Conséquence : dans les pays de l’Ouest, un sentiment de « racisme » contre eux se développe, aiguisé par des partis politiques pratiquant la haine de l’Autre et qui assimile tout Musulman à des islamistes. La situation est très grave car, une fois encore, on joue sur les mots et l’on jette la confusion sur « Arabes/immigrés/Musulmans/islamistes », de telle sorte qu’une partie de la population, notamment en France, assimile ces mots et ne fait plus la distinction : tout étranger du Sud est un islamiste en puissance et suscite un rejet souvent inconscient.   
On peut compter sur tous ceux qui, en France, et ils sont encore nombreux, luttent contre toute forme de racisme, car ils sont le dernier rempart contre un rejet de ceux qu’on appelle les « immigrés », même si ces derniers sont, pour la plupart, français, souvent depuis fort bien longtemps. Pour empêcher les dérives qui nous menacent (« nous » signifiant tous les Français), il faut, outre le combat permanent pour un monde fraternel, que ceux qui sont ainsi stigmatisés :
-rejettent, sans équivoque, le Front National;
-se montrent fermes et sans ambiguïté contre ceux qui dévoient le Coran;
-ne se prêtent pas au jeu de la confusion Juif/Sioniste entretenu, à dessein, par ceux qui veulent, une nouvelle fois, éliminer les Juifs.

  C’est ainsi que nous vaincrons la haine !
      

dimanche 27 juillet 2014

A propos des manifestations de "soutien à Gaza et à la paix"

ÉDITORIAL

Le Monde 24 juillet 2014

Contre la banalisation d'un nouvel antisémitisme


Il faut regarder cette vérité en face : il y a un nouvel antisémitisme en France. Il est aussi révoltant que celui qui a longtemps sévi dans l'Europe du XXe siècle. Ce n'est pas un antisémitisme d'Etat, bien sûr, comme au moment le plus sombre de l'histoire du pays. Pour autant, les organisations juives ont raison de tirer le signal d'alarme comme elles le font aujourd'hui. Une fois de plus.
Sur les quelque quarante manifestations de solidarité avec les Palestiniens de Gaza qui ont eu lieu en France depuis trois semaines, toutes ou presque se sont déroulées sans incidents. Ni violences de casseurs, ni violences antisémites. Le pays n'est pas en proie à une vague d'émeutes dont les juifs de France seraient la cible, comme le rapporte une certaine presse étrangère.
Manuel Valls met en garde avec sagesse : " Il faut être précis et ne pas tout mélanger. La grande majorité des manifestants défile pour des motifs légitimes – l'indignation face aux atrocités de la guerre ", a dit le premier ministre à notre confrère Le Parisien.
On aurait tort, cependant, de prendre pour des cas isolés ce qui s'est passé dans les trois manifestations qui ont dégénéré, à Paris et à Sarcelles. Des synagogues ont été menacées ou attaquées. Une pharmacie a été brûlée uniquement parce que sa propriétaire était juive. Une épicerie casher a subi le même sort. Des slogans intolérables ont été entendus : " Mort aux juifs ! ", " Hitler avait raison ! "
Impensable il y a quinze ou vingt ans, cette violence, celle des actes comme celle des mots, n'est pas exceptionnelle. Elle est représentative d'un antisémitisme banalisé, normalisé, qui s'exprime prioritairement dans une frange de la population musulmane, mais aussi ailleurs – notamment chez les inspirateurs de l'extrême droite.
Dans un fatras idéologique confus, mêlant djihadisme, défense de la cause palestinienne, détestation d'Israël et archétypes racistes les plus ignobles, c'est bel et bien la vieille théorie du " complot juif " qui est remise au goût du jour. Ce sont les mêmes stéréotypes judéophobes véhiculés à plaisir sur <internet, et qui finissent par tuer – d'Ilan Halimi, torturé à mort, en passant par les assassinats de Merah à Toulouse et à Montauban, ou, plus récemment, au Musée juif de Bruxelles.
Dans ces milieux, où Israël est démonisé, où les conflits arabo-arabes ne font pas descendre dans la rue, pas plus que les malheurs des chrétiens d'Orient, l'antisionisme n'est que la face mal cachée de l'antisémitisme.
On peut comprendre que le conflit israélo-palestinien ait un écho particulier chez les musulmans et les juifs de France, suscitant des solidarités naturelles. On peut néanmoins contester cette sorte de légitimisme par procuration qu'observent les représentants de ces communautés, qu'elles soient musulmane ou juive. Cette façon mécanique de s'aligner sans nuances sur les positions des parties en conflit sur le terrain ajoute à la polarisation des esprits.
Il reste cette vérité terrible : dans la France de 2014, dans certains quartiers, il n'est pas facile de porter une kippa – pour ne pas dire impossible. Refuser de voir cela, c'est fermer les yeux, lâchement.

jeudi 14 novembre 2013

Soutien à Christiane Taubira

 
Chère Christiane, permettez-moi cette familiarité de vous interpeller par votre prénom, c'est une façon pour moi de vous marquer mon estime et mon admiration.
 
Mon estime parce que vous avez illuminé ce début de mandat présidentiel, par ailleurs pas très réussi. Vous avez su, contre vents et marées, vous montrer "droite dans vos bottes" face aux ignominies d'une partie de la classe politique française dans le débat sur le mariage pour tous. Vous vous êtes montrée digne de la France des droits de l'Homme suite aux attaques de l'obscurantisme. Si notre pays peut conserver cette image de progressisme qui a toujours été la sienne, c'est grâce à vous et vous pourrez entrer dans le Panthéon de ceux qui ont fait de la France un havre d'espoir pour tous les damnés de la terre: les Condorcet, Victor Schoelcher, Jean Jaurès, Léon Blum, Robert Badinter. 
Au même titre que vos prédécesseurs, vous permettez à la France d'être un phare d'humanisme, quand vous défendez cette idée que la prison n'est qu'un pis-aller. Face aux réussites des pays qui ont institué la peine de probation que vous souhaitez mettre en place, seuls les réactionnaires de tous bords ont, une fois de plus, levé leurs boucliers anachroniques. Cette mesure aussi évidente qui consiste à, par exemple, ne pas mettre en prison celui qui a trop bu, mais de lui faire prendre conscience de sa responsabilité dans un lieu où sont hospitalisés les accidentés de la route, va dans le sens de l'Histoire et celle-ci vous en saura gré...
Mon admiration va vers la femme que vous êtes et qui reste digne malgré les attaques racistes et donc honteuses de concitoyens imbéciles. Mais comment ne pas s'étonner de cette haine, aujourd'hui, alors que la parole a été libérée par ceux qui ont repris le flambeau du racisme au mépris de nos valeurs républicaines qu'ils ont toujours combattues. L'extrême droite française, incarnée par un parti et des groupuscules qui tournent autour de lui, estimant qu'il se banalise, cette extrême droite, donc, ameute également tous les démagogues en quête d'un électorat qui leur fait défaut. Ils concentrent leur haine contre vous, parce que vous êtes d'une couleur de peau différente de la leur. Ils ne mesurent pas, ce faisant, qu'ils vous grandissent aux yeux de la majorité de vos compatriotes, car vous incarnez, par votre dignité, la Femme libre, humaniste et tolérante qui représente l'honneur de la France. Oui, Christiane, sachez que nous les Humanistes, les Républicains, les Démocrates, nous qui croyons aux progrès de l'Humanité et en la perfectibilité de l'Homme, sommes derrière vous et votre combat.
 
Permettez-moi de mettre en exergue de cette lettre l'article du Canard Enchaîné, paru ce mercredi et donc rédigé, en dernière minute, mardi, le jour même où Minute vous a salie

Taubiracisme 
Entre une morveuse de 12 ans qui agite une peau de banane en traitant Christiane Taubira de guenon et une publication hebdomadaire- même obscure- qui s'en prend à une ministre de la République en raison de sa couleur de peau, il y a un monde et une époque.
"Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane" ricane "Minute", feuille d'extrême droite en kiosques cette semaine. La gauche et le centre avaient mis du temps à dénoncer la campagne raciste contre Taubira lancée par les opposants au mariage pour tous. Les représentants de l'UMP n'ont pas rendu hommage à Taubira, lorsque la gauche lui rendait justice à l'Assemblée nationale. Entre ceux qui ont hésité à se lever et ceux qui sont restés assis, l'extrême droite s'engouffre avec délices. Elle teste la République. Voit jusqu'où elle peut aller. Face à ce déferlement, la ministre a répété qu'elle ne comptait pas porter plainte, afin de ne pas faire de publicité à cet hebdomadaire.
Nous ne tenons pas à lui en faire davantage. Mais si d'aucuns continuent à se demander : "La France est-elle raciste?", la réponse va de soi : la France, certainement pas. 
Mais certains Français, assurément !

Continuez, Christiane, votre combat pour la France, malgré tous les idiots qui vous, nous, narguent. Vous triompherez, nous triompherons du racisme et de l'obscurantisme. Nous verrons bientôt, grâce à vous, la lumière annonciatrice d'une société meilleure.

samedi 26 octobre 2013

JF Copé à la poursuite du FN



25 octobre 2013
ÉDITORIAL

Le droit du sol, principe cardinal de la République


L'affaire Leonarda est une bombe à déflagrations multiples. Dans la précipitation, les partis de gouvernement remettent sur le métier leur politique d'immigration. Manuel Valls juge soudain urgent de réformer le droit d'asile. AA : Les délais actuels, en moyenne dix-huit mois, permettent de se maintenir sur le territoire suffisamment longtemps pour devenir inexpulsables. Même avec d'importants efforts financiers il est impossible de trouver une procédure pour descendre en dessous d'une année de délai. Et Jean-François Copé - comme avant lui François Fillon - veut briser un " totem " auquel Nicolas Sarkozy avait renoncé à s'attaquer : celui du droit du sol. Le président de l'UMP va déposer une proposition de loi pour mettre fin à l'acquisition automatique de la nationalité française pour des enfants nés en France de parents étrangers en situation irrégulière.
Selon un universitaire, " cela paraît compliqué. Formellement, un enfant n'est pas tenu de demander de titre de séjour avant sa majorité, donc il n'est pas simple de lui imposer un critère de régularité de résidence.
Il faudrait donc que cette condition soit remplie par la famille de l'intéressé. Mais il faudrait déterminer à quel moment la famille - et qui dans la famille - doit avoir été en situation régulière. Prendrait-on par ailleurs en compte la date de naissance de l'enfant ? Sa majorité ? Accepterait-on les enfants nés dans des familles régularisées ? Partir de cette idée reviendrait à exiger de l'enfant une condition qui ne dépend pas de lui mais de ses parents, alors que le sens de la règle est de faire acquérir la nationalité aux enfants nés et scolarisés en France, donc en principe déjà intégrés".
De nombreuses études, dont l'une émane de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), ont pourtant démontré que le droit du sol favorise grandement l'intégration des enfants d'étrangers. Avant la Révolution et jusqu'au code Napoléon, ce principe s'est imposé. Entre 1804 et 1851, le droit du sang a prévalu afin de ne pas léser les enfants nés à l'étranger de parents français émigrés. Aujourd'hui, un enfant né en France de parents étrangers peut acquérir automatiquement à sa majorité la nationalité française s'il réside dans le pays depuis cinq ans. En 1993, Charles Pasqua avait introduit une conditionnalité - le jeune étranger devait manifester la volonté d'être français - abolie par Lionel Jospin en 1998. L'idée de Pasqua avait été abandonnée du fait de son coût et de son inefficacité et personne n'a ensuite songé à la reprendre.
Le droit du sol est donc inscrit dans les gènes de la France, un pays où, comme le rappelle l'ancien ministre UMP Patrick Devedjian, " plus de 25 % des Français ont au moins un grand-parent de nationalité étrangère ". A partir des années 1980, la plupart des pays européens l'ont adopté. L'Allemagne, longtemps arcboutée sur le droit du sang, est revenue sur ce principe en 1999. Et l'Italie, qui avait durci en 1992 un droit du sang imposant dix ans d'attente aux étrangers pour devenir italiens, s'est aperçue que c'était un leurre ne l'ayant pas empêché de devenir une des principales portes d'entrée de l'immigration en Europe.
La proposition de M. Copé est donc non seulement décalée, mais aussi démagogique. " Nous garderons le droit du sol, c'est la France ", avait proclamé M. Sarkozy durant la campagne présidentielle. Tout en évoquant une commission pour réviser le code de la nationalité, voire un référendum, Henri Guaino, son ancien conseiller, a défendu, mercredi 23 octobre, le droit du sol : " C'est un principe absolument fondamental de notre République, et même de notre pays, puisqu'il date de bien avant la Révolution. "
Une fois de plus, l'UMP, en panne d'idées neuves, court derrière le Front national, qui a fait de la suppression pure et simple du droit du sol une de ses matrices depuis plus de vingt-cinq ans. Alors qu'on attend des politiques une réflexion à la fois sur la lutte contre l'immigration clandestine et les moyens d'assurer l'intégration des immigrés en situation régulière, la proposition de M. Copé ravive le pire des maux français : la peur de l'étranger. 



jeudi 17 octobre 2013

"Provoc" ?

 

L'article, ci-dessous, du Monde, aborde un sujet étonnant : la sollicitude, voire plus, de certains milieux, il y a une quarantaine d'années, envers les relations sexuelles entre enfants et adultes.

Contrairement à l'homosexualité qui semble devenir un sujet banal, au point que l'union entre 2 personnes du même sexe a été légalisée dans beaucoup de pays, la pédophilie suit un chemin inverse : d'une certaine mansuétude, à une certaine époque, dans de petits cercles disons "libertaires", bien que l'adjectif ne soit pas tout à fait exact, on est revenu à une réprobation quasi-générale.

Dany Cohn-Bendit, à qui j'avais fait part, en 2002 ou 2003, de ma surprise sur ce qu'il avait écrit à ce sujet, m'expliqua (ce que l'on retrouve, en partie, ci-dessous, dans l'article du Monde) ceci :

- au moment des faits évoqués, l'idée de laisser parler la nature, était à la mode...

- quand il a écrit son livre, il s'agissait d'une provocation parmi celles auxquelles il nous avait habitué et il laissait entendre qu'il n'était pas allé aussi loin que décrit. De la pure provoc', confirme-t-il.

J'avoue que j'en suis resté pantois et ma désapprobation provoqua un haussement d'épaule de la part de celui qui avait marqué ma jeunesse... 

Il est étonnant que l'on n'en ait jamais reparlé, sauf François Bayrou qui y avait fait allusion et s'était fait critiquer pour avoir osé briser l'icone que représentait DCB.

Autres temps, autres moeurs ?

 

Pédophilie : Verts de honte en Allemagne 

LE MONDE |

La critique a d'abord touché Daniel Cohn-Bendit. Puis le parti écologiste dans son ensemble. Puis, par ricochet, le Parti libéral (FDP). Et maintenant la presse. Et la vague est loin d'être retombée. Trois ans après les révélations sur les pratiques pédophiles au sein de l'Eglise catholique, l'Allemagne s'interroge aujourd'hui sur sa tolérance passée à l'égard des rapports sexuels entre adultes et enfants.
"Les honneurs déshonorent, le titre dégrade", avait prévenu Flaubert. Daniel Cohn-Bendit a dû se mordre les doigts de ne pas avoir tenu compte de ce slogan de Mai 68 avant l'heure. Si le député européen n'avait pas accepté de recevoir, au printemps, le prestigieux prix Theodor-Heuss pour son engagement en faveur de la démocratie, rien de tout cela ne serait arrivé.

En effet, mi-mars, un mois avant la remise du prix à Stuttgart, Andreas Vosskuhle, le président de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, fait savoir qu'il renonce à prononcer l'éloge de l'ancien leader de Mai 68. La raison ? Ses écrits, "qui ne sont pas sans poser problème". Le magistrat fait référence au Grand Bazar (Belfond, 1975), ce livre dans lequel Daniel Cohn-Bendit raconte son expérience d'éducateur dans un jardin d'enfants autogéré de Francfort. "Il m'était arrivé plusieurs fois que certains gosses ouvrent ma braguette et commencent à me chatouiller, écrit-il. Je réagissais de manière différente selon les circonstances mais leur désir me posait un problème. Je leur demandais : "Pourquoi ne jouez-vous pas ensemble, pourquoi vous m'avez choisi, moi, et pas les autres gosses ?" Mais s'ils insistaient, je les caressais quand même."
A de nombreuses reprises, le député européen s'est par la suite défendu en expliquant qu'"il n'y a eu aucun acte de pédophilie. La pédophilie est un des crimes les plus abjects qui puissent exister. Il n'y a pas eu de ma part non plus de désir d'enfants. Là où il y a un grand problème, c'est mon désir de provocation".

DANS LE PROGRAMME DU PARTI EN 1980
Néanmoins, le renoncement d'Andreas Vosskuhle, l'absence, pour les mêmes raisons, de la ministre de la justice, Sabine Leutheusser-Schnarrenberger (FDP), et les manifestants rassemblés le 20 avril devant le château où se tient la cérémonie ont convaincu les Verts : impossible, à six mois des élections fédérales du 22 septembre, de se contenter de dénoncer une exploitation de faits anciens à des fins politiques. Pour éteindre l'incendie, le parti écologiste ouvre ses archives à Franz Walter, un professeur qui dirige un institut de recherche en science politique (Göttinger Institut für Demokratieforschung). Rémunéré 209 000 euros, celui-ci doit remettre son rapport à la fin de 2014, mais le contrat prévoit qu'à chaque fois que le chercheur fait une découverte significative il la publie sans attendre, se contentant de prévenir les Verts douze heures à l'avance.
Auteur de nombreux travaux de sociologie politique, Franz Walter ne passe pas pour être complaisant avec les Verts. La suite va le confirmer. Le 12 août puis le 16 septembre, le chercheur publie dans la presse deux articles retentissants. Dans le premier, il revient en détail sur le combat mené par les Verts pour dépénaliser les relations sexuelles entre adultes et mineurs, au même titre que les relations entre personnes de même sexe. Cette revendication figure explicitement dans le premier programme du parti, adopté en 1980. Il montre aussi comment, à la même époque, l'Association allemande d'études et de travail sur la pédophilie a fait du lobbying en ce sens et pesé sur les débats d'une autre formation politique, le Parti libéral (centre droit).
A la suite de la publication de l'article dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung, Dagmar Döring, l'une des responsables de cette association dans les années 1980, renonce à se présenter comme candidate du Parti libéral aux élections législatives.

"UN FORT HÉDONISME INDIVIDUALISTE"
Le 16 septembre, six jours avant le scrutin, second coup d'éclat. Dans un article paru cette fois dans la Tageszeitung, un quotidien très proche des Verts, Franz Walter explique qu'en 1981 Jürgen Trittin était le responsable du programme des Verts de la ville de Göttingen, dans lequel figurait noir sur blanc la dépénalisation de la pédophilie. Précision : durant la campagne d'octobre 2013, Jürgen Trittin, coprésident du groupe écologiste au Bundestag, était la tête de liste des Verts contre Angela Merkel. La même semaine, à la suite, là encore, des révélations de l'équipe de Franz Walter sur ses écrits passés, Volker Beck, le secrétaire général du groupe écologiste au Bundestag, annonce que, s'il est élu, il ne sera plus que simple député. Le 22 septembre, les Verts n'attirent que 8,4 % des électeurs. Deux fois moins que ce que laissaient encore prévoir les sondages un an plus tôt.
Pendant la campagne, les choses paraissaient simples : les Verts, dans leur volonté de subvertir l'ordre établi, avaient, lors de leur fondation dans les années 1980, plaidé pour une autre sexualité, plus permissive, allant jusqu'à porter des revendications qui, aujourd'hui, paraissent déplacées. La Frankfurter Allgemeine Zeitung a d'ailleurs publié, le 15 septembre, un article en ce sens (refusé par la Tageszeitung) dans lequel l'auteur, Christian Füller, expliquait sur deux pages que les Verts ont "créé une idéologie qui favorise l'abus des enfants".
Le professeur Walter ne partage pas cet avis. "La protection de la nature et le développement durable ne constituent pas un terreau propice à la pédophilie et à l'abus d'enfants. Mais les Verts ont un deuxième créneau qui est curieusement peu compatible avec le premier : une sorte de libéralisme fondamental associé à un fort hédonisme individualiste. Dans cet environnement, ont émergé dans les années 1970, avant la fondation des Verts, des revendications pour la dépénalisation des délits sexuels et pour une tolérance à l'égard de la sexualité entre adultes et enfants. Au début des années 1980, une partie de ce libéralisme radical s'est retrouvée chez les Verts", explique-t-il au Monde.

DANS LES ANNÉES 70, UNE PRESSE PLUTÔT COMPLAISANTE
Certains articles de la presse allemande des années 1970 illustrent cette tendance. D'ailleurs, le Spiegel et Die Zeit ont battu leur coulpe, à la suite des recherches du professeur Walter. "Les principaux médias de la République ont contribué à banaliser la pédophilie dans les années de la révolution sexuelle", reconnaît le Spiegel, qui consacre, le 1er octobre, plus de deux pages à cette "errance morale".
A plusieurs reprises, l'hebdomadaire a publié des articles complaisants à l'égard de la pédophilie, cette "variante plus tendre du travail social". Et que dire de cette "une" de 1977 sur "les enfants et le marché du sexe" illustrée par la photo d'une fillette de 12 ans simplement vêtue d'une paire de bas et d'un collier lui descendant jusqu'au nombril ? "Cette publication était problématique et elle le reste aujourd'hui", écrit le journal, qui a d'ailleurs retiré cette couverture et ce dossier de ses archives en ligne.
Les charges contre Die Zeit, l'hebdomadaire de l'intelligentsia allemande, sont aussi accablantes. Dans une série d'articles parue en 1969, Rudolf Walter Leonhardt, responsable du Feuilleton (l'équivalent d'une rubrique Culture et Débats), défend longuement la pédophilie, "un tabou qu'il faut revoir", estime-t-il, s'appuyant notamment sur certaines théories d'Adorno, du sexologue Alfred Kinsey, ou sur les pratiques d'intellectuels comme Edgar Allan Poe ou Novalis. Pour lui, les réactions émotionnelles des parents ou des autorités peuvent davantage perturber les enfants que les contacts sexuels eux-mêmes. "A côté de ce qu'a écrit Leonhardt, la plupart de nos découvertes sur les Verts qui ont provoqué tant de débats paraissent dérisoires", reconnaît Franz Walter. Mais, selon Die Zeit, qui consacre une page à cette "grosse bêtise", le 3 octobre, ce qu'écrivait Leonhardt correspondait à une opinion largement partagée dans les milieux libéraux de l'époque. Ses écrits ne semblent d'ailleurs avoir provoqué aucune colère particulière de la part des lecteurs.

DE NOUVELLES DÉCOUVERTES
Après Die Zeit et le Spiegel, il est probable que d'autres journaux et d'autres institutions effectuent un travail comparable sur leur passé. S'ils ne le font pas spontanément, les recherches du professeur Walter pourraient les y contraindre. "Jour après jour, nous faisons de nouvelles découvertes, surprenantes et souvent déprimantes. Ce sera une partie de l'histoire de la bourgeoisie libérale de gauche allemande. Celle-ci semble être jusqu'ici marquée par le succès de la démocratisation et de l'émancipation de la société allemande dans la République fédérale. Maintenant, apparaissent également au grand jour les ambivalences, les zones d'ombre des poussées de la libéralisation", commente Franz Walter.
Est-ce un hasard ? Les deux partis qui incarnent ce mouvement, les Verts et le Parti libéral, ont nettement reculé aux élections.

DES RÉPERCUSSIONS EN FRANCE ?
Les résultats des travaux de Franz Walter pourraient avoir des répercussions dans d'autres pays européens. Dès son premier article, le professeur a insisté sur l'influence des défenseurs de la pédophilie aux Pays-Bas, encore plus grande qu'en Allemagne, selon lui, ainsi que sur la France, où "il y avait une plus longue tradition et aussi une plus grande sympathie pour ce courant de pensée chez des intellectuels de premier plan qu'en Allemagne".
Et le professeur de rappeler que, en janvier 1977, la fine fleur de l'intelligentsia française, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Louis Aragon, Catherine Millet, André Glucksmann, Jack Lang et Bernard Kouchner, avait publié dans Le Monde et Libération une lettre ouverte dans laquelle elle affichait sa solidarité avec trois hommes détenus et en attente de procès pour délit sexuel à l'encontre d'enfants de 13 et 14 ans. La boîte de Pandore ouverte par les Verts allemands n'est pas près de se refermer...
 
Frédéric Lemaître