On ne peut pas croire que G. Dalongeville n'ait pas profité personnellement de l'argent détourné...

C’est une des questions qui risque de revenir comme une antienne au fil de ce procès. Gérard Dalongeville a-t-il ou, non bénéficié directement du système aujourd’hui mis à nu ? Autrement dit, y a-t-il eu oui ou non, en ce qui le concerne, enrichissement personnel ?

PAR PASCAL WALLART

La Voix du Nord du 21 mai 2013

 

Une question à laquelle l’ancien maire d’Hénin-Beaumont estime avoir répondu une fois pour toutes à travers ses confessions de janvier 2011 et le grand déballage qui s’en est suivi un an plus tard lors de la parution de Rose Mafia. Pour schématiser l’argumentaire de M. Dalongeville, tout ce système aurait donc eu pour but d’alimenter de manière occulte les caisses du parti socialiste du Pas-de-Calais. AA : il n'est pas pensable que GD, non membre du PS, ait fait profiter ce parti de l'argent détourné (je rappelle qu'il fut adhérent MRC en 2001, puis n'a pas renouvelé sa cotisation avant d'adhérer au PS en juin 2008). Manoeuvre de «blanchiment» dont son premier adjoint, Claude Chopin, aurait été le grand artisan. Sans pour autant, fort curieusement, en avoir bénéficié personnellement. Une théorie qui, depuis lors, est devenue l’axe de défense de l’ex-premier magistrat, mais qui ne lève pas les doutes nés au fil de la procédure. Ah, l’argent héninois. L’argent des Héninois… Que de millions d’euros seront, pendant les années auscultées par les enquêteurs de la « financière » et le juge Pair, non pas partis en fumée, mais transférés de manière (désormais) avérée dans la poche de chefs d’entreprise, intermédiaires et facilitateurs… Une manne dont il reste désormais à déterminer si elle a également fait les choux gras d’autres bénéficiaires. Dont Gérard Dalongeville, dont les déclarations n’ont jusqu’alors pas éclairci un certain nombre de zones d’ombre et d’interrogations légitimes.

Avec un point de départ fort logique : comment imaginer qu’alors que des dizaines de milliers d’euros étaient, à un rythme infernal et via des appétits jamais complètement assouvis, soustraits des finances héninoises, l’ordonnateur ait été uniquement guidé par un hypothétique altruisme sans jamais prendre part à la fête. AA: on n'imagine pas GD faire des cadeaux à tous... Une interrogation qui peut laisser perplexe au regard de certains éléments du dossier. Tour d’horizon.

– Le coffre : au départ, il n’existait pas. En tout cas, Gérard Dalongeville en avait décidé ainsi. Jusqu’à en nier toute connaissance alors même que le vice-procureur vient de le mettre au jour, dans un recoin du bureau majoral. Après mûre réflexion, le maire admet finalement connaître l’existence de ce qui a dû servir avant son arrivée en mairie mais sans qu’il en ait eu la clé ou la combinaison. Et lorsque, après passage d’un serrurier, on y découvre 15 000 euros dormant dans deux enveloppes portant le sigle de la mairie, l’homme reste dans le registre de l’étonnement. Une position qui ne variera qu’en janvier 2011 lorsqu’il confesse qu’il s’agit là «de l’argent du parti» issu de commissions occultes. AA : On a également retrouvé les empreintes de GD sur les enveloppes. Cette série de mensonges est révélatrice de sa mauvaise foi.

– Les versements en liquide : l'ombre est toujours de rigueur quant aux interrogations soulevées par les enquêteurs sur les importantes sommes déposées entre 2005 et 2008 sur le compte joint du couple Dalongeville et celui de sa compagne. Un total de 113 400 €, dont 94 000 sur le seul compte joint. Une somme conséquente dont la compagne de l’ancien maire confiera ne pas connaître l’origine. « Quand je lui ai posé la question de savoir d’où cela venait il m’a répondu que cela venait de son héritage. Quand j’ai insisté il ne m’a pas répondu… » expliquera-t-elle aux enquêteurs en précisant sa « peur » face à ce que pourrait déclencher ses déclarations. Des versements en liquide qui troublent notamment les enquêteurs lorsqu’ils mettent en parallèle les déclarations de l’ancienne directrice d’ISA, Corinne Watteau (elle aussi mise en examen),  affirmant que l’apporteur d’affaires Jean-Claude Bertoldi(autre mis en examen qui a déjà eu maille à partir avec la justice dans une affaire de trafic d’influence ayant éclaboussé l’ancien président du Sénat, Christian Poncelet) aurait versé une rétro commission de 8000 euros à M. Dalongeville début juin 2008. Fait troublant, les 7 juin, 25 juin et 2 juillet, c’est une somme totale de 11 000 euros qui est déposée sur le compte du couple Dalongeville. Ces sommes, l’ancien maire d’Hénin les justifie maladroitement, évoquant des sommes perçues au décès de sa grand-mère… mais c’était en 1997 ! Et dans l’hypothèse où cette manne a vraiment existé, Gérard Dalongeville est incapable d’expliquer aux enquêteurs pourquoi, lorsqu’en janvier 2008, Guy Mollet lui extorque 50 000 euros au bénéfice de sa fille, le maire règle alors avec le chéquier familial et non en puisant dans cette réserve ! Même gêne lorsque M. Dalongeville affirme qu’une partie de ce liquide provient de la location de la maison de sa mère, dans les Vosges, alors qu’une enquête de la gendarmerie locale atteste que jamais la maison n’aura été louée. AA : Cette nouvelle série de mensonges conforte la malhonnêteté de GD.

- Voyages, voyages : autre source de suspicion que la  multiplication des voyages effectués par le maire et sa famille en toute opacité. En effet, chaque été, Gérard Dalongeville annonçait se rendre dans les Vosges et lorsque le séjour se prolongeait c’est qu‘il avait été  hospitalisé pour bénéficier d’un mystérieux traitement. Or la réalité était tout autre. Outre des voyages familiaux réglés par la société Deberdt de Jean-Marc Bouche pour quelque 13 000 euros (un geste commercial selon le chef d’entreprise, des sommes remboursées selon le maire), le  maire d’Hénin-Beaumont peut se targuer de 36 séjours à l’étranger depuis 2001 et pas sur des bases de low cost puisqu’un séjour familial aux États-Unis, en 2007, a coûté la bagatelle de 22 480 euros après des séjours à Cancun ou Saint-Martin pour plus de 9 000 euros. Pourquoi une telle opacité qui vaudra d’ailleurs à l’ancien maire un redressement fiscal ? 

Réponse, s’il y en a une, à partir du 27 mai.

AA : la question serait plutôt de savoir si, en dehors des voyages, l'argent perçu par GD, cet argent qui été versé par les contribuables héninois, a servi à d'autres fins. Je serais étonné qu'il en fût autrement...