Le Monde 18/5
La culture marxiste est-elle encore présente au sein du PS et, plus globalement, dans les partis européens d’inspiration socialiste ?
La culture marxiste est-elle encore présente au sein du PS et, plus globalement, dans les partis européens d’inspiration socialiste ?
Force
d’opposition ou force de gouvernement, parti de rupture ou exercice du
pouvoir : loin d’être propre à la France, cette tension n’a cessé de
travailler les partis socialistes européens. Et elle plonge ses racines, en
effet, dans la théorie de Marx et Engels : crise inéluctable du
capitalisme, rôle prééminent de la classe ouvrière, rupture révolutionnaire.
A la fin
du XIXe siècle, les premiers sociaux-démocrates s’en réclament.
Le parti modèle est alors le Parti social-démocrate d’Allemagne (SPD), que les
socialistes de toute l’Europe viennent visiter : un parti puissant,
organisé autour de la classe ouvrière, qui ne parvient pas au pouvoir dans
l’Allemagne bismarckienne autoritaire mais qui n’en joue pas moins un rôle
sociétal et théorique important.
Au milieu
des années 1890 survient au SPD un premier grand débat, que l’on appellera la
« querelle révisionniste ». Elle oppose deux hommes politiques et
théoriciens, Eduard Bernstein et Karl Kautsky. Bernstein estime qu’un certain
nombre de prédictions énoncées par Marx sur l’évolution du capitalisme ne se
vérifient pas : il faut donc, selon lui, abandonner l’idée révolutionnaire
et se diriger vers une logique plus réformiste. Face à lui, Kautsky défend le
dogme marxiste et l’idéal révolutionnaire. Le débat sera officiellement tranché
en faveur de Kautsky. Mais dans la réalité, dès cette époque, la
social-démocratie allemande commence à s’orienter vers le réformisme.
Entre
marxistes et sociaux-démocrates européens, la grande rupture survient
en 1917. Lénine, qui prend le pouvoir en Russie, se pose en garant du
« vrai » marxisme et considère que la social-démocratie a dégénéré
parce qu’elle en a trahi les principes. Cet affrontement détermine une grande
partie de l’histoire de la gauche du XXe siècle, en séparant
la famille communiste d’un côté, la famille social-démocrate de l’autre.
En
France, en 1920, la SFIO voit ainsi la majorité de ses adhérents rejoindre
l’Internationale communiste – d’où la phrase fameuse de Léon Blum au congrès
socialiste de Tours : « Il faut que quelqu’un reste garder la
vieille maison. » Pour autant, Blum lui-même ne rompra avec le
marxisme qu’à partir de 1946, au lendemain de la seconde guerre mondiale :
il plaide alors pour un socialisme humaniste. Quant à l’emblématique SPD, ce
n’est qu’à partir de 1959 et du congrès de Bad Godesberg qu’il prendra
véritablement ses distances avec le dogme révolutionnaire.
« A
dater de 1959, la culture marxiste ne constitue plus la colonne vertébrale des
social-démocraties européennes. Elle n’en reste pas moins très prégnante au
sein de la gauche, que celle-ci soit ou non au pouvoir »
A dater
de ce tournant, la culture marxiste ne constitue plus la colonne vertébrale des
social-démocraties européennes. Elle n’en reste pas moins très prégnante au
sein de la gauche, que celle-ci soit ou non au pouvoir.
En
France, Guy Mollet, secrétaire général de la SFIO de 1946 à 1969, s’en
réclamait toujours, et Mitterrand lui-même s’y convertit dans le contexte des
années 1960-1970. Si les dogmes de la dictature du prolétariat et de la crise
inéluctable du capitalisme sont progressivement tombés en désuétude, le
marxisme a longtemps continué à fournir aux socialistes européens sa grille de
lecture des réalités sociales. Jusqu’à ce que ces partis soient traversés,
à partir des années 1990, par un autre débat : celui de la
« troisième voie ».
A suivre
Il est mort parce qu'il a fait Trotski!
RépondreSupprimerLa permaculture, il faut étudier lol
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