jeudi 26 septembre 2013

Lepénisation des esprits ?


Le Monde 26/9/2013 (éditorial)

Roms : la faute de Manuel Valls.

Peu de temps après son installation au ministère de l'intérieur, Manuel Valls avait assuré vouloir traiter le problème des Roms "dans la sérénité". Faisant référence au discours prononcé à Grenoble, en juillet 2010, par le président de la République de l'époque, Nicolas Sarkozy, il ajoutait : "Ce n'est pas facile. Si le débat est remis sur la place publique de la manière dont cela a été fait il y a deux ans, on n'y arrivera pas."
A l'évidence, il n'y arrive pas. Les propos qu'il a tenus le 24 septembre sont aux antipodes de la sérénité à laquelle il invitait. Il ne s'est pas contenté, en effet, d'assurer – ce qui est son rôle – qu'il ferait procéder, à chaque fois qu'une décision de justice le justifie, au démantèlement des campements illégaux où s'entassent quelque 15 000 Roms dans des conditions indignes, à la lisière de nos grandes villes. Il ne s'est pas contenté de juger, comme en mars, que "les Roms ont vocation à rester en Roumanie ou à y retourner".
Il a relancé le débat exactement sur le terrain où l'avait placé la droite : l'impossibilité, sauf pour "quelques familles", d'intégrer ces populations dont les "modes de vie extrêmement différents des nôtres" et entrent "en confrontation" avec les populations voisines. Dès lors, sauf exception, "il n'y a pas d'autre solution" que de démanteler les campements et de renvoyer leurs occupants dans leur pays d'origine.
Ce faisant, le ministre de l'intérieur sait qu'il exprime, tout haut, l'irritation de bon nombre des élus locaux concernés et qu'il répond à leur sentiment d'impuissance. De même, il veut entendre l'exaspération devant l'augmentation de la petite délinquance dans la capitale ou quelques grandes villes, à laquelle les Roms contribuent pour une part non négligeable – en particulier les mineurs, souvent organisés par des réseaux mafieux.
Si ce n'est du cynisme, drapé dans un langage de "vérité", c'est une faute lourde. Politique autant que morale. Depuis des semaines, sans même que l'extrême droite ait besoin de s'y employer, la droite a délibérément choisi de faire de la "menace" que constitueraient les Roms un thème explosif des prochaines élections municipales et, au-delà, européennes. En apportant de l'eau à son moulin, M. Valls donne crédit à cette campagne qui joue, sans vergogne, sur la peur de l'étranger et fait des Roms des boucs émissaires parfaits.
Mais en désignant l'ensemble d'une population étrangère – et néanmoins européenne –, en stigmatisant une population ethniquement étiquetée, en la jugeant incapable de s'intégrer en France, le ministre de l'intérieur renonce à des principes élémentaires républicains : l'accueil, l'intégration, la solidarité.
Plusieurs voix, à gauche, l'ont immédiatement déploré. Celle de Martine Aubry, maire de Lille, qui a invoqué "l'humanité et l'efficacité, c'est-à-dire la République". Celle du ministre Arnaud Montebourg, qui a jugé le propos de M. Valls "excessif" et estimé qu'il devait être "corrigé". Il a raison.
Et c'est au président de la République de le faire, avec fermeté et, si possible, sérénité. C'est sa responsabilité et son devoir.


Remarques AA : 

- 15 à 20 000 personnes d'origine européenne qu'on ne veut pas intégrer ! Décidément la France est en pleine dérive morale. 
- Il est évident que la Roumanie est la première fautive en ne favorisant pas l'intégration de ses habitants, malgré les sommes considérables données par Bruxelles. Et c'est là-dessus que  les efforts de la France doivent porter en priorité... ce qui ne signifie pas qu'il ne faille pas lutter contre les maffiosi qui exploitent une partie des Roms (et là, c'est de la compétence du ministre de l'Intérieur). Tout cela facilitera le devoir d'hospitalité qui a toujours fait l'honneur de la France. Pendant la crise de 1929, notre pays a su accueillir des millions de personnes et les a intégrées. Aujourd'hui le nombre d'immigrants n'a jamais été aussi faible... Ne nous laissons pas emporter par cette xénophobie et ce racisme que l'on tente de nous instiller, en justifiant ces poisons par la période de crise que nous vivons ("les immigrés prennent le travail des Français", "place à la préférence nationale"). Et dire que c'est l'Allemagne qui donne l'exemple de ce que immigration massive et santé économique vont de pair...
- C'est effectivement au président de la République de mettre fin à la dérive sécuritaire qui inspire certains élus de gauche et pas des moindres. F. Hollande s'honorerait à siffler la fin de la récréation...

19 commentaires:

  1. "ces populations ont des modes de vie extrêmement différents des nôtres et qui sont évidemment en confrontation" avec les populations locales. "C'est illusoire de penser qu'on règlera le problème des populations roms à travers uniquement l'insertion", "il n'y a pas d'autre solution que de démanteler ces campements progressivement et de reconduire (ces populations) à la frontière"
    Manuel Valls, ministre de la république

    C'est raciste ça !
    C'est une stigmatisation d'un groupe d'individus en raison de ses origines, de ses moeurs et de sa culture.

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  2. WIKIPEDIA:Le racisme est une idéologie qui, partant du postulat de l'existence de races humaines1, considère que certaines races sont intrinsèquement supérieures à d'autres2. Cette idéologie peut entraîner une attitude d'hostilité ou de sympathie systématique à l'égard d'une catégorie déterminée de personnes. L'hostilité peut générer chez la victime de la stigmatisation et de la discrimination qui à son tour va entraîner une auto-stigmatisation et une auto-discrimination proportionnelle3. Cette hostilité envers une autre appartenance culturelle et ethnique se traduit par des formes de xénophobie ou d'ethnocentrisme. Certaines formes d'expression du racisme, comme les injures racistes, la diffamation raciale, la discrimination, sont considérées comme des délits dans un certain nombre de pays. Les idéologies racistes ont servi de fondement à des doctrines politiques conduisant à pratiquer des discriminations raciales, des ségrégations ethniques et à commettre des injustices et des violences, allant jusqu'au génocide. rappel de SR71.

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  3. Pour les Inrocks, Roms : “Manuel Valls réhabilite un racisme à l’ancienne”
    http://www.lesinrocks.com/2013/09/26/actualite/roms-feher-interview-racisme-a-lancienne-11430105/

    Pour 20 Minutes en Suisse : "Manuel Valls traité de raciste par ses pairs"
    http://www.20min.ch/ro/news/monde/story/26553844

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  4. ce n'est pas du racisme...Manuel Valls est pragmatique...jamais une population étrangère n'aura eu un comportement aussi négatif a l'égard du pays accueillant....et fort heureusement les roms ne sont pas musulmans....! ils auraient tous les" défaut"....
    car la toute la France serait contre eux...

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    1. "jamais une population étrangère n'aura eu un comportement aussi négatif a l'égard du pays accueillant..."
      D'où tirez-vous cette information ?

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    2. c'est un constat, je suis certains que vous en penser pas moins, sans pour cela cautionner la méthode et le vocabulaire employé...ni les polonais, ni les italiens, ni les algériens, ni les marocains, ni les portugais....ont eux des attitudes semblables a l'égard de le France....
      lisez cette article de Arno Klarsfeld...clique sur ROM ou copiez le lien ci dessous
      http://leplus.nouvelobs.com/contribution/943697-les-roms-on-les-deteste-c-est-des-voleurs-le-jour-ou-j-ai-visite-un-ghetto-a-bucarest.html

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    3. Encore une fois, ce ne sont que des avis, mais il n'y a aucune statistique indiquant que"jamais une population étrangère n'aura eu un comportement aussi négatif a l'égard du pays accueillant..."

      Qu'est-ce qui permet de corroborer ce jugement ?

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  5. La question qui est posée est celle de l'universalisme. Avec les principes de la révolution, la République, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; on a considéré qu'il y avait un homme universel. C'est une belle idée, mais qui est remise en cause aujourd'hui. Théoriquement car c'est prétentieux, c'est occidental, ethnocentrique, méprisant pour les autres cultures, notre universalisme n'est en fait qu'une construction sociale qui est marquée par notre culture et donc n'est pas vraiment universelle , c'est de l'impérialisme. Mais aussi en pratique : l'immigration européenne, chrétienne, culturellement et historiquement proche le masquait , mais il y a rupture aujourd'hui , les pays musulmans ont adopté une Chartes des droits de l'homme musulman, il faut admettre les coutumes et les moeurs des populations etc...
    Il ne s'agit pas de racialiser les roms, et de dire qu'ils sont inférieurs , soyons sérieux avant de parler de racisme. Valls pose une question : culturellement, historiquement, par tradition, mode de vie et d'organisation sociale, peuvent-ils s'intégrer dans la société française?

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    1. Et comment ont fait les Polonais, par exemple ? Européens et catholiques comme les Roms ? Ils y sont parvenus pourtant, et pourtant, cela ne fut pas facile...

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    2. Je n'ai pas de réponse. Le débat intellectuel, philosophique et politique se pose ainsi et Valls, lui a répondu à sa manière.
      Concernant la Pologne , il y a une grande différence. France et Pologne sont des amis et alliés historiques ( à tel point que certains disent, un peu abusivement que la France a créé la Pologne ). C'est un pays de culture catholique , comme la France. Européen, comme la France. Les polonais sont exogames. Ils considèrent qu'il y a une différence entre la sphère publique et la sphère privé. Ils considèrent l'autonomie de l'individu face à la collectivité. Ils considèrent l'égalité de l'homme et de la femme dans la construction de leurs rapports. Ils considèrent la primauté du Droit écrit. etc... On explique assez bien l'intégration possible des Polonais en France : la culture polonaise est similaire à la culture française, et les principes fondateurs sont les mêmes.
      Dire qu'il y a diversité culturelle ( et il y a évidemment une diversité des cultures ) , c'est dire qu'il y a des différences : la question est de savoir jusqu'où , sous quels critères etc... ces différences peuvent s'effacer ou se concilier. Pour les roms, je ne sais pas, je ne m'y connais pas.

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    3. Les Polonais , comme ensuite les Italiens sont venus à la demande des entreprises Françaises répondre à la chute des effectifs liés aux guerres , dont l'extrême droite fut responsable rappelons le .Comme celle des Français , la culture et religion était catholique .Des heurts se produisirent bien sur , les étrangers font toujours peur et , celà est vrai , ils furent quelques fois briseurs de grève , mais aussi expulsés pour ces mêmes faits faits de grève , c'est d'ailleurs ainsi que devint plut tard Gierek président . Mais en même temps , Polonais , Italiens puis bien d'autres comme Portugais , Espagnols , Cambodgiens etc fuyant les régimes fachistes d'extrême droite tel Franco , Salazar et autres nous rejoignirent , se fondirent à la masse dira t on , créérent leur entreprises , leurs jeunes devinrent cadres , enseignants , médecins chirurgiens, dirigeants d'entreprise ou politiques .De religion on ne parlait point ou juste pour quelques fêtes locales , on ne remarquait même pas "l'étranger " . Alors aujourd'hui deux problèmes , religion et pourquoi les ROMS chassés de leur pays ne peuvent ils pas avoir droit de travailler ou créer une entreprise , mais en même temps pourquoi ne sont pas scolarisés leurs enfants ?

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    4. A votre dernière question : c'est ce qu'ils demandent. Voyez les associations qui essayent de les aider. Elles vont même jusqu'à leur donner des cours, car les parents sont demandeurs quoiqu'en pensent certains.

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  6. "Désormais, l'argumentation raciste ne se fonde plus sur la hiérarchie mais sur la différence, non plus sur les attributs naturels imputés au groupe "racisé", mais sur sa culture, sa langue, sa religion, ses traditions, ses moeurs. Le nouveau racisme, dans cette perpective, insiste sur la menace que la différence des groupes visés ferait peser sur l'identité du groupe dominant."
    page 32 Le racisme,une introduction. Michel Wieviorka

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  7. La situation de quelques 18 000 Roms de citoyenneté roumaine ou bulgare en France ( les autres, gens du voyage, sont français) n'est pas un problème Rom mais un problème de grande pauvreté. C'est en Roumanie et en Bulgarie que se situe la source de ces difficultés.
    Et bien non, les bidonvilles ne seront jamais silencieux et sereins et la misère favorisera toujours le bruit, la malpropreté,la mendicité, les déchets,(sans douches ni toilettes , comment feriez-vous?) les vols et les mafias ... c'est presque une Lapalissade. Et l'on peut comprendre la réaction des riverains.Mais par pitié,encore une fois, et encore une fois en période de crise économique et politique, ne faisons pas des victimes des boucs émissaires!
    Les différences culturelles? Bien sûr et elles peuvent être enrichissantes. D'ailleurs une culture sans apports de l'ailleurs est figée, cela s'appelle du folklore! Essentiel mais pas suffisant.
    Et les ressemblances culturelles? Nous n'en parlons que trop peu. On aime souvent de la même façon, on éprouve souvent les mêmes joies, on partage les mêmes émotions et les mêmes craintes.Une même humanité.
    Il n'y a pas si longtemps, il se disait que les italiens pauvres ne pourraient jamais s'intégrer à la culture française.

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    1. Je crois que vous avez raison, le problème vient de la pauvreté. Pas de travail, pas de mixité, donc il y a des tensions etc..
      Je suis en désaccord concernant la question culturelle par contre. Personne ne dit qu'il n'y a pas d'enrichissement possible par la différence culturelle. Bien sûr il y a une inter-pénétration. Mais il ne s'agit pas de cela. L'intrication du système politique, religieux et social en Inde produit une société de castes. C'est formidable, c'est enrichissant, c'est un autre de mode de penser et voir le monde. Maintenant, je pense que vous serez d'accord pour dire que si un famille indienne veut s'intégrer en France, il faudrait qu'elle abandonne cette idée selon laquelle les mariages, le travail, la dignité de citoyen, les droits varient selon la caste de naissance, non? Il s'agit simplement de ça. Il y a des pays d'Afrique où l'excision est rependue à plus de 95%. C'est là encore formidable, c'est enrichissant, c'est un autre de mode de penser et voir le monde. Mais on préfère penser que cette pratique est incompatible avec notre universalisme, non? En tout cas, quitte à être moins universaliste, je préfère ne pas accepter ça.

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    2. Vous caricaturez.Vous extrapolez? Comment échanger?

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    3. Vos exemples sur l'excision et les castes ne sont pas bons, car ils ne correspondent pas à des valeurs universelles telles que le respect de la personne, la liberté de faire ce que l'on veut de son corps, de sa vie... tout en tenant compte des règles du bien vivre ensemble.
      Certes, vous avez raison de rappeler que les valeurs occidentales ne rencontrent pas toujours celles d'autres civilisations et pourtant il y a un plus petit dénominateur commun, bien illustré par notre tryptique républicain : liberté, égalité, fraternité. J'ajouterais bien la laïcité, car après tout, certains pays musulmans et des musulmans l'acceptent comme non contraire à leur religion....

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    4. Je ne sais pas si ils sont bons, c'est vrai, mais c'est réel. Après je ne sais pas qui nous sommes pour décider ce qui relève de l'universel ou pas. Pourquoi ça serait Pierre et pas Paul , l'universel?
      Le problème est justement qu'on a cru que notre liberté , notre démocratie, notre égalité était universelles. Or, ça ne tombe pas du ciel. Tout cela repose sur d'autres choses : l'existence de l'individualité ( les grecs était parfaitement démocratique, mais la notion d'individu était étrangère à leur culture ) , et la primauté de l'individu sur la communauté ( dont la conséquence principale est le refus de la polygamie ) , la séparation du privé et du public, le clivage du spirituel et du temporel, le Droit, l'égalité de l'homme et de la femme dans leurs rapports. Tout ceci fait que nous n'avons pas LA liberté, L'égalité, LA démocratie ; nous avons une liberté historiquement construite et culturellement particulière. Dans d'autres cultures on considère que l'individu n'a de sens que dans et par la communauté : le système d'organisation social et politique change dès lors radicalement, dans d'autres cultures, on considère que le temporel et le spirituel est une seule chose.
      Le système indien nous parait incroyable, inégalitaire. Mais l'intrication du religieux et du politique, l'absence de distinction entre l'organisation sociale et la vie spirituel produit un processus de légitimation des castes pas moins efficace que celui de notre démocratie.
      On ne peut pas arriver et dire : Voici la liberté ! La notre est la vrai ! Voici notre égalité, c'est la meilleure. Alors il faut respecter la diversité des cultures sans accepter n'importe quoi, et il faut penser que nous sommes universalistes en sachant qu'il y a des différences indépassables.

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    5. C'est exactement ce que j'exprimais mais il n'y a pas je crois de différences indépassables. Il y a aussi des temps historiques, des contextes de guerre divers, des courants, des périodes heureuses et malheureuses...
      En Grèce Antique Démocratique, les esclaves, les femmes et les "métèques" n'avaient pas le droit de vote.Seul,un citoyen pouvait accéder à la propriété.
      Le système des castes est remis en cause en Inde même. L'excision est une coutume exécrable, mais une coutume relevant plus du mépris et de la volonté de dominer les femmes, leur plaisir et le contrôle de leur procréation que d'une "nature différente". Je ne sais d'ailleurs, si elle a été pratiquée de tous temps. Beaucoup d'africaines et d'africains luttent contre cette horreur .En Iran, avant la venue des intégristes, les femmes avaient beaucoup plus de place et de pouvoir( droit de vote...) qu'en France.. Et que dire du monde arabe, des califats omeyyades puis abbassides, de pays se réclamant de la laîcité, de la splendeur de leur poésie,de leur mathématique de leur architecture, de leur art de vivre. Que reste t-il? L'Islam intégriste , c'est à dire peu.
      Il y a pourtant une même humanité, La "mode", quelquefois factice , de nos sociétés occidentales, pour la spiritualité orientale témoigne de cette recherche d'absolu absolument universelle.

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