jeudi 24 janvier 2008

Manger mieux pour vivre mieux (bis)

J'ai, à plusieurs reprises, signalé ici, combien le combat pour une nourriture de qualité était important pour les problèmes de santé que nous connaissons, dans le Nord-Pas de Calais, et plus particulièrement dans le Bassin Minier. Je suis toujours aussi persuadé que c'est un axe prioritaire pour une politique municipale.
Aussi l'article paru dans Le Monde, daté d'hier, confirme mes craintes pour l'avenir (les passages en gras sont de mon fait)

Le Monde
23 janvier 2008

Les produits alimentaires du supermarché comportent des étiquettes très complètes. Le hic est qu'on n'y comprend rien. Nous avons donc fait les courses avec un nutritionniste. Reportage
Manger sain ? Plus facile à dire qu'à faire


Les enfants élevés aux céréales, aux nuggets, aux biscuits fourrés... seraient les malades de demain. GRÉGOIRE KALT POUR " LE MONDE "

Pouah ! " lâche le docteur Laurent Chevallier en parcourant les rayons du supermarché. Ce nutritionniste, qui vient de publier Impostures et vérités sur les aliments (Fayard), a accepté de nous aider à remplir notre chariot en déjouant les pièges de la malbouffe. Objectif : santé. Il ne s'agit pas seulement de manger moins gras, moins sucré, moins salé, mais aussi de limiter la chimie dans notre assiette. Car, à moins de connaître par coeur les " apports nutritionnels journaliers recommandés " et de comprendre le nom de toutes les substances ajoutées dans les denrées transformées, décrypter la liste des ingrédients qui figurent sur les étiquettes ressemble à une gageure.

Arômes, colorants (E100 à E180), conservateurs (E200 à E297), émulsifiants, épaississants, texturants (E400 à E495), exhausteurs de goût (E620 à E650), agents d'enrobage, édulcorants, stabilisants, pesticides... L'accumulation et l'association de tous ces additifs ont fini par créer, selon le nutritionniste, " des risques non maîtrisés sur la santé ". Les enfants s'habituent au goût chimique des aliments, le tout sur fond de progression constante de l'obésité, du diabète et des maladies cardio-vasculaires. " Notre alimentation s'est plus transformée ces quarante dernières années qu'en vingt siècles ", résume le docteur Chevallier. Jamais l'offre alimentaire n'a été aussi riche, la conservation des aliments aussi sûre, jamais les emballages n'ont affiché autant d'allégations " santé " (" riche en fer, en calcium ", " pauvre en matières grasses ", " bon pour la croissance ") mais jamais la médecine et le grand public ne se sont autant interrogés sur le contenu de nos assiettes.

DÉSESPOIR AU RAYON PETIT-DÉJEUNER
Au rayon des snacks pour l'apéritif, le médecin passe son chemin. " 36 grammes de lipides pour 100 grammes ", résume-t-il en montrant une boîte de petits fours au gouda et en fuyant les étagères de chips. Que faut-il prendre ? " Raisins de Corinthe, olives, noix ou petites tomates ", conseille-t-il. Au rayon épicerie, seules les huiles de colza, de noix et d'olive extra-vierges trouvent grâce à ses yeux ainsi que les boîtes de tomates entières pelées. Pas question d'opter pour des sauces prêtes à l'emploi, de la purée en sachet ou des mayonnaises allégées. Quant aux soupes industrielles, " bien regarder le taux de lipides ".
Au rayon petit-déjeuner, désespoir : les interminables rangées de céréales sucrées, chocolatées, bourrées d'arômes et de sirop de glucose (ou pire : de glucose-fructose) posent, selon lui, " un vrai problème ". Quant aux biscuits et viennoiseries industriels, " la liste des ingrédients est beaucoup trop longue pour ne pas être suspecte ". Zoom sur un paquet de " brioche tranchée ", où l'on explique que les céréales, " dont les brioches ", sont la base indispensable de l'alimentation. Commentaire du médecin : " Il est bien indiqué qu'il y a 54 % de farine, mais lorsqu'il s'agit du sirop de glucose, des émulsifiants, des arômes et des colorants, les proportions ne sont plus affichées. "

Dans les linéaires de produits frais, le tri est vite fait. Les nuggets et autres " grignotes " de poulet, les bâtonnets de crabe (sans crabe) et les saucisses faussement " 100 % pur porc " lui " foutent les jetons " : on ne sait plus ce que l'on mange. Devant l'interminable rayon de yaourts, desserts lactés et margarines, le nutritionniste est radical. Rien de mieux qu'un yaourt nature que l'on aromatisera soi-même. Quant aux margarines, pas la peine de se ruiner dans la " pro-active " à 6 euros : le beurre ou la margarine de base à 2 euros feront largement l'affaire.

Rien ne sert non plus d'espérer affiner sa ligne en choisissant des produits " light ". Proposés depuis les années 1980, les produits allégés en sucre ou en matière grasse agiraient comme " des leurres pour le cerveau ". " Ils perturbent le contrôle de la faim, peuvent renforcer l'appétit pour le sucré et finalement entraîner une surconsommation alimentaire compensatrice ", explique le docteur Chevallier. Bref, pour sa santé, mais aussi pour le porte-monnaie - l'" allégé " est souvent plus cher que l'" original " -, autant mélanger un peu d'eau dans sa vinaigrette si on veut vraiment la rendre plus légère.

En somme, il faudrait " réorienter son alimentation ". D'abord, fuir les produits à l'interminable liste d'ingrédients. Ensuite, limiter sa consommation d'aliments transformés : presser ses oranges le matin, aromatiser son yaourt avec une confiture maison, prendre une boîte de tomates entières pelées pour assaisonner ses pâtes plutôt qu'une sauce industrielle bourrée de lipides. Pour les enfants, donner du pain et du chocolat, plus une compote maison pour le goûter, de la viande et du poisson plutôt qu'un " cordon bleu pané ", augmenter sa ration quotidienne de fruits et légumes, etc.

Les enfants élevés aux céréales le matin, aux nuggets à midi, aux biscuits fourrés à 4 heures et aux chips et boissons sucrées gazeuses devant la télé seraient les malades de demain. Pour l'heure, certains additifs alimentaires comme les colorants artificiels sont accusés, selon une étude britannique publiée en septembre dans The Lancet, de favoriser l'hyperactivité infantile.
Et ne dites pas au docteur Chevallier que ses recettes coûtent cher. Même en termes de pouvoir d'achat, le consommateur aurait tout à gagner à limiter l'alimentation " complexifiée " et " suremballée ". " Que ta nourriture soit ton premier médicament ", disait Hippocrate, père de la médecine moderne. Cette phrase n'a pas pris une ride.
Sandrine Blanchard
© Le Monde

2 commentaires:

  1. Un livre à lire à tout prix sur cette question : Tous gros demain ? de Pierre Weill, chez Plon. Outre qu'il est précis, clair et documenté, il est agréable à lire, poétique même, et qu'il ne se contente pas de faire un constat, il propose aussi des explications au phénomène du surpoids, sans agressivité, sans culpabiliser les victimes. Si vous en avez marre d'entendre dire que la télévision, l'inactivité et l'hérédité (on dit aujourd'hui «génétique»)sont les principales causes du développement de l'obésité, allez vite faire la connaissance de Lucy, Lulu, Loulou le gourou et Lili, ainsi que celle de Lucien, Louise, Léon la tradition et quelques autres.

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  2. A proscrire aussi les matières grasses hydrogénées. Elles sont parfois utilisées dans certains restaurants ou friteries (restauration collective, je ne sais pas!). Une chaîne de "restauration" rapide connue ne les utilise plus dans son pays d'origine; mais continue en France, faute de règlementation et tout en n'ignorant rien de leur nocivité (!)
    L'hydrogénation permet de ralentir le rancissement et de stabiliser le produit. Ces matières grasses sont parfois appelées trans (pour transformées)ou shortening pour les huiles végétales. Une huile 100% végétale, si elle est hydrogénée n'est pas saine. Ces matières augmentent le mauvais cholestérol tout en diminuant le bon.

    Mais attention, il faut aussi les débusquer ailleurs que dans les rayons huiles et margarines puisqu'elles entrent dans la composition de plusieurs céréales, biscuits, pains, barres diverses, chocolats, etc (de marques connues)dont les enfants sont friands.

    Alors, oui à l'alimentation saine et équilibrée à l'école, aux ateliers de cuisine pour tous, au développement des circuits de proximité.
    Nicole

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