dimanche 4 octobre 2009

Les fausses évidences de la réforme territoriale

Le texte qui suit concerne le projet de réforme territoriale et s'intéresse à 2 points: le nombre d'élus et les dérapages financiers.

Je reviendrai sur 2 autres sujets critiques: la suppression de la clause de compétence générale (les collectivités peuvent prendre toutes les compétences qu'elles souhaitent) et la quasi suppression des ressources propres des collectivités (culminant avec la disparition de la taxe professionnelle représentant 50% des revenus des communes!).

En fait , l'Etat n'avance même plus masqué: il veut recentraliser! Hier, je parlais des atteintes gravissimes à l'état de droit, fondement de notre démocratie (interventions intempestives du chef de l'Etat dans les domaines judiciaire et législatif; irresponsabilité des ministres...), demain l'on reviendra à l'Etat centralisateur , héritage de siècles d'autocratie royale, dont nous ne nous sommes débarrassés en grande partie qu'en 1981, grâce aux lois Deferre.



Les fausses évidences de la réforme territoriale, par Claudy Lebreton
LE MONDE

oulon, 25 septembre 2008. Le président de la République annonce que "le moment est venu de poser la question des échelons de collectivités locales dont le nombre et l'enchevêtrement des compétences est une source d'inefficacité et de dépenses supplémentaires". Un an plus tard, à force de l'asséner, le message fait office de dogme. Le président a focalisé l'attention de nos concitoyens sur une image de l'organisation territoriale qui se décline en superlatifs : "trop d'échelons", "trop d'élus", "trop d'indemnités", "trop de dépenses somptuaires", etc. En la matière, le président de la République n'en est pas à son coup d'essai. Il est un expert en communication politique. Mais le sens de la formule ne fait pas une réforme.

Combien d'élus en France ? Un président de la République et 39 ministres, 998 parlementaires, 1 880 conseillers régionaux, 4 220 conseillers généraux et 36 838 maires, auxquels il faut ajouter environ 492 000 conseillers municipaux. Or la réforme territoriale - et notamment l'emblématique création des conseillers territoriaux - ne vise que les départements et les régions. Elle exclut de son champ d'application la Corse et l'Outre-mer. Au final, cette réforme ne concerne que 1 % des élus. Cherchez l'erreur...

Dans ces conditions, de quelles économies d'échelle parle-t-on ? Parmi les idées reçues dont le gouvernement nous rebat les oreilles depuis des mois, il y en a deux au moins que je veux combattre.

Première idée reçue : "Les élus coûtent cher." Sur les 536 000 fonctions électives, 410 000 correspondent à des mandats de conseillers municipaux dans des communes de moins de 2 500 habitants et 110 000 dans des communes de 2 500 à 100 000 habitants. Donc 520 000 élus exercent dans des communes où ne sont indemnisés que les maires et les adjoints.

Restent 15 000 élus, dans les communes de plus de 100 000 habitants, les conseillers généraux et régionaux et les parlementaires.

Un maire-adjoint dans une ville de plus de 100 000 habitants ne peut prétendre percevoir qu'une indemnité nette d'environ 2 000 euros par mois. L'indemnité d'un conseiller général ou régional, elle, oscille entre 1 200 et 4 000 euros, avec un plafond de 5 500 euros pour les présidents. En réalité, 90 % des élus sont bénévoles. Pour ma part, les indemnités que je perçois comme président du conseil général des Côtes-d'Armor se montent à 4 500 euros. Demain, quelle indemnité pour le conseiller territorial ? Faudra-t-il "payer" ce nouveau professionnel de la politique, comme un président de la République (20 000 euros par mois), un premier ministre (18 500), un ministre (11 à 12 000), ou un parlementaire (5 500) ?

Je prends le pari que pour faire accepter cette réforme, le gouvernement sera conduit à proposer une revalorisation substantielle des indemnités versées aux élus locaux. Quelles économies alors ?

Deuxième idée reçue : "La confusion des responsabilités conduit à des dérapages financiers supportés par les contribuables." Je l'affirme, les collectivités n'interviennent pas partout, à tout propos, sans cohérence. 90 % des actions engagées par les départements et les régions relèvent de leur champ de compétences propres. La confusion, c'est le gouvernement qui l'entretient depuis des mois. Qui assure la réussite du plan de relance ? Qui investit chaque année près de 50 milliards d'euros (soit 73 % des investissements publics) ? Qui, aujourd'hui, crée de la croissance et de l'emploi sinon les collectivités locales aux côtés des entreprises et de leurs salariés ? Et l'Etat dans tout ça ? Est-il en mesure de faire la leçon aux collectivités locales en matière de finances publiques quand son déficit a doublé en un an ? Si l'endettement des collectivités locales est bien réel, il ne représente pas plus de 11 % de la dette publique de l'Etat, qui s'élève à 1 500 milliards d'euros. De l'Etat ou des collectivités locales, le plus vertueux dans la maîtrise des budgets n'est pas celui qu'on croit...

Pour autant, ne faut-il rien changer ? Non. L'organisation de notre territoire doit être améliorée. Mais la réforme territoriale devra être débattue en toute transparence. Elle devra être acceptée par les citoyens et les élus et reposer sur des principes clairs, loin des idées reçues et des calculs politiciens.


Claudy Lebreton est président du conseil général des Côtes-d'Armor, président de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains.


Article paru dans l'édition du 25.09.09

11 commentaires:

  1. j'ajouterai :
    qui s'occupe principalement de l'enfance, des personnes âgées, des personnes en situation de handicap, des personnes en situation d'exclusion
    les collectivités locales

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  2. Quand on voit le fric que gagnent ces assistés, c'est écoeurant.

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  3. Extrait de la Gazette ses communes du 29 septembre dernier:

    La nouvelle Cotisation économique territoriale - Décryptage
    S. Fagnart | Publié le 29 septembre 2009 : maintenir les moyens des collectivités.
    La cotisation économique territoriale, qui succèdera à la taxe professionnelle sera composée de deux impôts : la cotisation locale d'activité, et la cotisation complémentaire. Explications.

    Le nouvel impôt appelé à remplacer la taxe professionnelle (TP) s’intitulera la Cotisation économique territoriale. Elle sera composée de deux impôts différents.
    D’une part, la cotisation locale d’activité, assise sur le foncier occupé par l’entreprise. D’autre part, la cotisation complémentaire, assise sur la valeur ajoutée produite par l’entreprise, à partir de 500 000 euros de chiffre d’affaires et limitée à 3 % de la VA, contre 3,5 % aujourd’hui.

    Le scénario dévoilé tout d’abord par le gouvernement prévoyait une certaine spécialisation de l’impôt par niveau de collectivité. Au bloc communal (communes et intercommunalités), la cotisation locale d’activité.
    Aux départements et aux régions, la cotisation complémentaire. Mais sans possibilité pour leurs assemblées d’en décider le taux.

    Devant la bronca des associations d’élus locaux, le gouvernement a décidé de ne pas choisir et de s’en remettre, pour la répartition de deux éléments constitutifs de la nouvelle CET, à « la sagesse » du Parlement.

    La CET devrait rapporter aux collectivités 5,3 milliards issus de la CLA, et 11,5 milliards de la CC. Au-delà de la part déjà supportée par l’Etat au titre des dégrèvements et des exonérations (pour un montant de 11,2 milliards), les collectivités devraient retrouver, selon la promesse du gouvernement, le même niveau de recettes (28 milliards) grâce à de nouvelles compensations de l’Etat et grâce à des taxes exceptionnelles frappant notamment EDF, France Telecom ou la SNCF. Sur le premier point, les élus locaux protestent, pointant la dégressivité prévue d’une telle compensation : - 5 % par an.

    Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, lors du congrès de l’Assemblée des départements de France, les 22 et 23 septembre 2009, indiquait que si la suppression de la TP interviendrait, pour les entreprises, dès 2010, la cotisation complémentaire et les autres ressources destinées à la remplacer n’entrerait en vigueur qu’en 2011.
    Le ministre a promis aux présidents de conseils généraux un dispositif de « garantie de stabilité » de leurs recettes. “Nous proposons que les collectivités locales bénéficient en 2010 d’une compensation relais qui sera égale soit au produit de 2009, soit aux bases de 2010 multipliées par les taux de taxe professionnelle de 2008”, a-t-il indiqué.
    cimares

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  4. Ah, revoilà qu'on reparle du problème du "mille-feuille". Un sujet intéressant ...

    Faut-il une réforme. oui c'est évident. La décentralisation lancée en 1981 a été une avancée extraordinaire. Aujourd'hui, il faut continuer d'affiner cette organisation sans la remettre en cause. Comment ? En réfléchissant à la fiscalité sans pour autant faire perdre aux collectivités locales leur autonomie financière, en réfléchissant à la répartition des compétences et en décentralisant que de vrais compétences utiles, pas des cadeaux empoisonnés, en réfléchissant dans une logique d'efficience et d'efficacité : il y a peut-être trop de communes : quand on sait qu'il existe des communes qui compte moins de 20 habitants et dont le budget est d'environ 25 000 euros par an !!!, les intercommunalités doivent être mieux découpées géographiquement, plus fortes, la taille de certains départements n'est pas critique pour peser, enfin certaines régions sont trop petites pour peser dans le débat européen. Voilà donc plusieurs leviers. Enfin, si le cumul des mandats s'appliquait (y compris dans le temps) la démocratie pourrait s'exprimer davantage. Bref, on pourrait en dire beaucoup sur ce sujet ....

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  5. Dommage Alain, enfin surtout pour l'Escapade, pour le refus de celle ci de participer au projet "des Amis de l'Escapade".Car les personnes présentes avaient la motivation et l'ambition de sauver ce lieu culturel ; de plus les compétences étaient réunies dans le cadre de la recherche de fonds et d'un partenariat au niveau des Entreprises afin d'apporter cette bouffée d'oxygene....
    Olivier.

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  6. en 2004 avec la "décentralisation acte 2", le législateur, reconnaissant le savoir faire des collectivités territoriales, a confié à ces dernières de nouvelles compétences.
    parallèlement il est question de revenir sur limiter les marges de manœuvre de ces dernières.

    c'est peut être le syndrome "hinault manaudou" on n'aime pas ceux qui réussissent
    t etm

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  7. Ou peut être que finalement c'est pas une réussite. Dans un soucis de productivité on peut certainement faire mieux avec moins d'élus et moins d'employés.

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  8. la question n'est pas là anonyme de 16h58.
    La question est pourquoi confier massivement de nouvelles compétences aux collectivités territoriales pour annoncer ensuite une réforme en raison dixit de "l'enchevêtrement des compétences de ces ct"
    la rentabilité d'après moi aurait été de reformer avant de confier ces nouvelles compétences
    t et m

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  9. La question n'est certainement pas de répondre au pourquoi de T et M mais comment va-t-on réformer ?

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  10. la réforme avant le sens
    un plan de looser
    t et m

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  11. Pourquoi réformer ?
    Car l'organisation territoriale actuelle de la France conduit à "trop d'échelons", "trop d'élus", "trop d'indemnités", "trop de dépenses somptuaires".

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