vendredi 6 juillet 2012

Élections législatives et Conseil constitutionnel (1)



L'élection législative dans la 11ème circonscription du Pas-de-Calais fait l'objet d'une saisine du Conseil Constitutionnel (Numéro de la requête 2012-4588) par l'électeur Steeve Briois, pour annulation de l'élection, le député contesté étant Philippe Kemel, élu avec 118 voix d'avance, le 17 juin dernier. La contestation porterait sur les signatures portées sur les listes d'émargements, "des différences importantes entre les signatures des premier et second tours sur les listes d'émargement dans deux communes, à Carvin et Libercourt", selon le FN
Aux termes de l'article 59 de la Constitution , « le Conseil constitutionnel statue, en cas de contestation, sur la régularité de l'élection des députés et des sénateurs ».
Indépendamment des requêtes émanant d'un électeur ou d'un candidat aux fins d'annuler l'élection d'un député (AA : que nous examinerons ci-dessous), le Conseil constitutionnel peut également être saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques .
AA : J’ai interféré en rouge des remarques et commentaires.
En 2 parties, nous examinerons la procédure devant le Conseil Constitutionnel (I) et l'expérience des législatives de 2007 (II)
I- Le conseil constitutionnel, juge de l'élection des députés
A – Formes et délais des recours
La Constitution a confié au Conseil constitutionnel le soin de statuer, en cas de contestation, sur la régularité de l'élection des députés. Les modalités de ce contrôle sont fixées par l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. L'élection d'un député peut être contestée devant le Conseil constitutionnel par tout électeur de la circonscription intéressée ou par toute personne qui y a fait acte de candidature. La procédure est enserrée dans des délais brefs puisque le recours est ouvert jusqu'au dixième jour qui suit la proclamation des résultats de l'élection, au plus tard à dix-huit heures. Pendant ces dix jours, les procès-verbaux des bureaux de vote restent à la disposition des personnes pouvant exercer le recours dans les bureaux de la préfecture. AA: le FN, dans la 11ème circonscription a donc pu consulter les listes d'émargement.
La requête, obligatoirement formulée par écrit, peut être rédigée sur papier libre. Elle est dispensée de tous frais de timbre ou d'enregistrement. Elle est adressée au préfet ou au représentant de l'État dans les collectivités d'outre-mer qui la transmet au Conseil constitutionnel. Le Conseil peut aussi être saisi directement par requête adressée à son secrétaire général. Le délai de dépôt (dix jours) est le même, quel qu'en soit le lieu.
La requête doit préciser le nom, les prénoms et la qualité du requérant, le nom des élus dont l'élection est contestée ainsi que les moyens d'annulation invoqués.Tout au long de la procédure, le requérant ou l'élu dont l'élection est contestée peuvent être assistés ou représentés par un avocat ou toute autre personne qu'ils désignent.
B – Procédure
Sauf en cas de requête manifestement irrecevable ou fondée sur des griefs manifestement sans influence sur le résultat de l'élection (AA: voir plus loin: près de 90% d'entre elles requêtes sont ainsi écartées), la requête est instruite par une section d'instruction composée de trois membres nommés du Conseil constitutionnel ou par le Conseil lui-même. La section est assistée pour chaque affaire par un des dix rapporteurs adjoints désigné pour présenter l'affaire et proposer une solution. Ces rapporteurs adjoints sont, pour cinq d'entre eux, membres du Conseil d'État et, pour les cinq autres, de la Cour des comptes.
L'instruction se caractérise par une procédure contradictoire, avec échange de mémoires entre les parties. Une enquête peut être ordonnée, ainsi que la communication de toute pièce permettant d'apporter un éclairage utile au Conseil.
Le règlement applicable à la procédure devant le Conseil constitutionnel permet également l'audition des parties. Le Conseil fait droit à une demande d'audition d'une des parties lorsqu'il s'avère utile de préciser les arguments de celle-ci ou d'obtenir des éléments de fait utile à la résolution de la contestation. Toutes les parties sont alors convoquées. L'audition a lieu non pas devant la section d'instruction mais en séance plénière. L'audition donne lieu à un procès-verbal versé au dossier. Le Conseil peut lui-même, à titre de mesure d'instruction et en dehors de toute demande des parties, organiser une audition. Le rapporteur adjoint assiste à toutes les auditions.
La section d'instruction entend le rapporteur adjoint, délibère sur ses propositions, peut ordonner toute mesure d'instruction et porte l'affaire devant le Conseil en vue de son jugement au fond. La date d'examen en séance plénière est déterminée par le Président. Le rôle est rendu public quarante-huit heures avant la séance sur le site Internet du Conseil.
Lorsque le Conseil se réunit en séance plénière, le rapporteur adjoint est entendu en son rapport. Ce dernier assiste au délibéré sans toutefois prendre part au vote.
C – Décision
La décision est motivée. Elle fait l'objet d'une notification au Président de l'Assemblée nationale. Elle est publiée au Journal officiel. Les parties en reçoivent copie. Le député dont l'élection est contestée est personnellement informé de la suite donnée à la requête.
La requête formée contre l'élection d'un député n'a pas d'effet suspensif (AA: dans notre cas, P. Kemel demeure député). Tant qu'une décision d'annulation des opérations électorales n'est pas rendue, la personne proclamée élue continue d'exercer son mandat de député. AA: Les conséquences concernant les cumuls de mandat me semblent suspendues. P. Kemel reste ainsi député en même temps que maire, vice-président du Conseil Régional et de la CAHC. 
Le Conseil constitutionnel peut soit rejeter la contestation et valider l'élection, soit prononcer l'annulation de l'élection (ce qu'il a fait à 63 reprises depuis 1958), soit réformer les résultats et proclamer élu un autre candidat (ce qu'il n'a jamais fait à ce jour). Ses décisions sont souveraines et revêtues de l'autorité de la chose jugée. En effet, aux termes de l'article 62 de la Constitution « les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ».
Source: le site du Conseil Constitutionnel http://www.conseil-constitutionnel.fr

A suivre: les contentieux de 2007

4 commentaires:

  1. En cas d'invalidation, cela ne portera donc que sur le deuxième tour ? Ce qui me semble d'ailleurs plus raisonnable, dans ce cas est ce que les deux protagonistes de la première élection doivent obligatoire participer à l'élection ?
    J'ai cru comprendre que l'argument de M Kemel pour le cumul était que si il n'était finalement pas député (!!!) il aurait abandonné un poste pour rien. Je répéte une question posée déjà il y a quelques jours, un élu est il si peu occupé par un mandant qu'il puisse ainsi cumuler ?
    Mais la question n'est pas récente et il me semble qu'un seul mandat de député, sénateur, maire ou conseiller d'une assemblée territoriale devrait suffire ? Quels sont les arguments qui pourraient contredire cela ? Car de base je n'aime pas critiquer quand je n'ai pas moi même pratiqué (ex : je trouve inssuportable les gens qui critiquent les enseignants sans avoir jamais ne serait ce qu'accompgner une classe dans une sortie, et je ne suis pas enseignante).

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  2. Non, non...
    S'il y a annulation, on recommence tout...
    Pour le reste, je vous convie à lire une série de posts que j'ai publiés
    le 27/3/2008 et les jours suivants:
    http://alpernalain.blogspot.fr/2008/03/le-cumul-des-mandats-en-france-un-frein.html

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  3. Les tricheurs ne connaissent pas la vraie joie de gagner. »
    de Maurice Sachs [+]
    Extrait du Derrière cinq barreaux

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  4. J'ai lu vos posts de 2008 et je vois que vous aviez déjà proposer des restrictions, et des compensations ce qui parait légitimes.
    Je crains qu'une invalidation ne nous redonne donc des sueurs froides. Mais peut être y aura t il moins de candidats dès le début ?

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